Accueil


APOSTASIE n. f. (du grec apostasia, abandon)

Anciennement le mot apostasie ne s’employait guère que pour désigner l’abandon d’une religion en faveur d’une autre : Ex. : L’apostasie de l’empereur Julien. Mais le mot n’a pas tardé à avoir une acception plus large et à désigner également l’abandon d’un parti ou d’une doctrine sociale. Ex. : L’apostasie du politicien Alexandre Millerand, en France ; L’apostasie du politicien Mussolini, en Italie ; L’apostasie du politicien Vandervelde, en Belgique ; du politicien Branting, en Suède, du crapuleux, de l’infect Gustave Hervé, en France, etc... L’apostasie, en matière de politique, peut avoir parfois pour cause des mobiles d’ordre intellectuel ou sentimental. Mais c’est là un cas très rare. Partisans de l’absolue liberté de pensée et d’action pour chacun, nous ne pouvons que déplorer le peu d’esprit de suite et de persévérance des compagnons qui se retirent de la lutte après avoir milité ouvertement. Mais nous ne pouvons les condamner, s’ils ont la pudeur de disparaître de la scène sociale et de ne pas aggraver leur désertion d’une trahison. D’ailleurs, il se peut que la lutte ait épuisé l’énergie ou les forces intellectuelles d’un homme : dans ce cas, sa retraite nous inspire des regrets, mais sollicite toute notre indulgence. Toutefois, comme nous l’avons dit, le cas d’une apostasie propre est très rare. Généralement l’apostat est un politicien qui estime qu’en passant dans un autre camp, il aura plus de profits qu’en restant dans le camp où il se trouve. A la base d’une apostasie, on retrouve presque régulièrement ces deux mobiles : l’argent et les honneurs. C’est pour cela que lorsqu’un parti ou un groupement social est pauvre, on peut compter ses militants. Mais dès que le parti devient riche, il se présente de toutes parts des politiciens désireux d’offrir leurs services. Les partis les plus riches en argent sont toujours les plus riches en politiciens, politiciens venus d’autres partis ou d’autres sectes dont la caisse sonnait le vide. D’autre part, les partis politiques naissants sont généralement pauvres en argent, mais ils sont riches en espoir de développement. Aussi recrutent-ils facilement des ambitieux qui calculent qu’en ayant un peu de patience, il pourront se faire la place convoitée. Ces ambitieux-là savent, en effet, que dans les partis déjà vieux, les cadres sont pleins et qu’ils auraient à surmonter d’innombrables difficultés pour se tailler une part suffisante du gâteau. Et c’est à cause de toutes ces considérations, que les anarchistes peuvent avoir pleine confiance dans leurs militants. Les politiciens ne s’aventurent pas chez eux puisqu’ils n’y pourraient récolter que la misère et les persécutions. Inutile, naturellement, de multiplier les exemples d’apostasie : la chose est devenue tellement courante en politique, qu’il n’y a qu’à regarder autour de soi pour considérer des renégats de toute espèce.

Georges Vidal