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ATAVISME n. m. 

Il ne faut pas confondre atavisme avec hérédité et employer indifféremment un mot pour l'autre comme on le fait souvent. L'atavisme n'est, en effet, qu'une forme ou plutôt une variété de l'hérédité.

Elle est si peu l'hérédité toute entière, dans le sens complet du mot, que la force représentée par le mot « atavisme » se trouve en lutte continuelle avec l'hérédité directe.

Prenons l'homme pour exemple : alors que l'hérédité lutte pour transmettre directement au descendant les qualités acquises ou innées du père et de la mère, l'atavisme tend à lui donner celles du grand-père, de la grand-mère des collatéraux et cela en remontant plusieurs générations. Il n'est pas rare, en effet, de voir un enfant ressembler à son arrière grand-père ou même à son trisaïeul. L'atavisme agit beaucoup moins dans le sens collatéral d'oncle à neveu. Mais cette force peut faire sentir son action jusqu'à des origines bien plus lointaines et cela pour la race comme pour l'individu, C'est ainsi, par exemple, qu'on trouve parfois, parmi les hommes blancs d'aujourd'hui, des types dont le crâne reproduit franchement celui de l'homme moustérien qui vivait il y a environ cent mille ans. Il n'est pas rare de voir, aux colonies, et même en Europe, des familles où, d'un père et d'une mère blancs, naît un enfant au teint de mulâtre ou même complètement noir, sans qu'on puisse mettre en cause le facteur adultérin. En remontant un nombre plus ou moins grand de générations, on trouve toujours, dans ce cas, un ancêtre de couleur.

L'atavisme peut également agir dans le domaine de la pathologie en transmettant par exemple au petit fils ou à l'arrière petit-fils la maladie ou la tare morbide de son aïeul ou de son bisaïeul, maladie et tare dont se trouve exempt l'ascendant direct : le cancer, l'obésité, la goutte, le diabète, et par dessus tout la folie et autres affections nerveuses sont dans ce cas.

D'après certaine doctrine biologique, pourtant contestée, les qualités, aptitudes intellectuelles et morales seraient aussi soumises à l'action de l'atavisme.

On peut donc définir l'atavisme une force qui tend à faire réapparaître chez les êtres vivants des caractères absolument étrangers aux parents immédiats.

Cette force dont le rôle est considérable dans la formation des espèces, s'exerce non seulement chez l'homme mais dans tout le règne animal et dans le règne végétal. Elle est ainsi une des nombreuses preuves de l'unité absolue du phénomène vital.

Certains biologistes prétendent que les phénomènes d'atavisme sont plus fréquents chez les animaux que chez les végétaux.

Quoi qu'il en soit, tous s'accordent aujourd'hui pour reconnaître que l'hybridation produit, en matière d'atavisme, les mêmes résultats en botanique qu'en zoologie ; l'atavisme ramène toujours, au bout d'un temps plus ou moins long, le produit de l'hybride ­ quand celui-ci est fécond, et il ne l'est pas toujours ­ au type primitif.

En zoologie, les cas d'atavisme, c'est-à-dire de retour au type primitif, les plus connus sont ceux des produits de la brebis et du bouc. L'ovicapre, né de cette hybridation, peut se reproduire pendant plusieurs générations, mais si on l'accouple avec une brebis ou un bouc, le produit est nettement brebis ou bouc.

Il en va de même pour le serin et le chardonneret, autre exemple commun et frappant.

Considération philosophique. - On ne fait pas en criminologie une place suffisante à l'atavisme. Dans la recherche et le dosage de la responsabilité, on ne tient compte que de l'hérédité directe ; les médecins spécialistes ne déterminent et ne mesurent cette responsabilité que d'après l'examen immédiat de l'inculpé ; rares sont ceux qui font entrer en ligne de compte l'hérédité indirecte, il n'en est pas un seul qui songe à scruter les générations passées, ce qui serait pourtant possible quelques fois, et conforme à la justice, hélas! bien relative des hommes. 

- P. VIGNÉ D'OCTON.