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ATOME

On peut mesurer, à la notion actuelle de l'atome, les progrès accomplis, depuis à peine un quart de siècle, non seulement par la physique et la chimie, mais aussi par la philosophie scientifique, en ce qui concerne notre conception de la matière.

Vieille de 2.000 ans, la théorie de l'atome insécable, indestructible, représentant la plus petite quantité d'un élément qui puisse entrer en combinaison, elle a été formulée par le grand poète romain Lucrèce, en ces vers immortels que l'on ne peut lire aujourd'hui, sans un étonnement admiratif :

« Les corps ne sont pas anéantis en disparaissant à nos yeux, la nature forme de nouveaux êtres avec leurs débris, et ce n'est que par la mort des uns qu'elle accorde la vie aux autres. Les éléments sont inaltérables et indestructibles. Les principes de la matière, les éléments du Grand Tout sont solides et éternels, nulle action étrangère ne peut les altérer. L'atome est le plus petit corps de la nature. Il représente le dernier passé de la division. Il existe donc dans la nature des corpuscules d'essence immuable... leurs différentes combinaisons changent l'essence des corps. »

Une trentaine d'années ont suffi pour voir disparaître cette conception de l'atome née dans le cerveau de Démocrite et restée presqu'intacte jusque dans celui de Berthelot.

C'est surtout à la découverte du radium et de la radio-activité qu'est dû ce résultat quasi-miraculeux. On voit par conséquent tout le mérite qui revient à M. et à Mme Curie, d'avoir les premiers étudié et signalé les merveilles qui s'accomplissent par les atomes de cet élément, ainsi que par ceux du potassium, du thorium et autres métaux spontanément radio-actifs.

Mais il ne faut pas oublier, et on le fait, hélas! trop facilement, que le véritable inventeur de la radio-activité, dans le sens le plus général, c'est le Dr Gustave Le Bon, C'est à lui autant, peut-être plus, qu'à J.-J. Thomson, Becquerel et autres, que nous devons la notion actuelle de l'atome, telle qu'ont permis de l'établir la radio-activité universelle de la matière (par lui découverte), et celle des corps spontanément radio-actifs, comme le radium, l'uranium, etc., etc.

On considère aujourd'hui l'atome comme un petit grain de matière formé d'autres petits grains nommés électrons, qui ne seraient plus de la matière, mais des tourbillons d'éther comparables à des gyrostats. Ces électrons étant des particules électriques, l'atome étant composé d'électrons, ne serait autre chose que de l'électricité ; de son côté, la matière étant composée d'atomes, ne serait pas autre chose que de l'électricité.

« La théorie électrique de la matière, a dit le physicien anglais Lodge, restera comme la plus grande découverte du XXème siècle. »

Comment sont disposés dans l'atome, les électrons, ses éléments constituants? Et comment expliquer la formation des atomes?

C'est encore au Dr Gustave Le Bon que nous devons les plus claires réponses à ces deux questions.

D'après lui, complète serait l'analogie. entre la formation d'un atome et celle de notre système solaire : l'atome, en effet, étant un système solaire en miniature, composé d'électrons négatifs, tournant avec une vitesse prodigieuse autour d'un centre ou noyau, formé d'ions ou électrons positifs.

Dans le système du monde de Laplace, le soleil et les plantes auraient d'abord été une nebuleuse au centre de laquelle, s'est formé un noyau animé d'un mouvement de rotation et duquel se détachèrent successivement des anneaux qui formèrent, plus tard, la terre et les autres planètes. D'abord gazeuses, ces masses se sont progressivement refroidies, et l'espace que remplissait primitivement la nébuleuse n'a plus été occupé que par un petit nombre de globes, tournant sur eux-mêmes et autour du soleil.

Il est probable que les choses se sont passées ainsi lors de la formation des atomes ; et ce qui le prouverait, je le répète, c'est l'analogie aujourd'hui bien établie, entre la construction d'un système planétaire et celle de l'atome.

La matière se composerait donc de ces petits sys­ tèmes solaires en miniature.

Conception à la fois grandiose et mathématique d'une portée philosophique considérable, et devant laquelle s'évertue vainement le scepticisme des penseurs (?) retardataires et réactionnaires.

P. VIGNÉ D'OCTON.