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BAGUETTE (magique)

Baguette vient de l'italien bacchetta, qui est un diminutif de baculus (bâton). Ce mot veut donc dire « petit bâton ».

La baguette a, de tout temps, été employée comme insigne, comme marque extérieure d'une dignité. Dans les mythes, dans les légendes, la baguette désigne souvent les héros. Les puissants, civils ou religieux, ont ensuite employé ce commode signe de supériorité ; c'est avec une baguette que Moïse faisait jaillir l'eau des rochers ! De nos jours encore, dans certains pays, les magistrats portent un bâton quand ils sont en fonction, et les officiers de service se munissent d'une baguette. De là, sans doute, vient l'expression : « Mener à la baguette », c'est-à-dire rudement, militairement. « Les baguettes » se dit d'une punition militaire. Le soldat, les épaules nues, est obligé de passer entre deux haies de « frères d'armes » qui le frappent tour à tour d'une baguette flexible. Dans son « Candide », Voltaire décrit magistralement ce supplice.

Il est compréhensible que la baguette ait acquis un certain sens d'autorité que les charlatans ne pouvaient manquer d'exploiter. C'est avec une baguette (magique) que les sorciers prétendaient accomplir des choses surnaturelles. Dans le langage du théâtre, un « rôle à la baguette »l signifie un rôle de fée ou de magicien. Au Moyen-Âge, apparaît la « baguette divinatoire », brindille d'arbre à laquelle nos crédules paysans attribuaient toutes sortes de propriétés (découverte de sources, de trésors, de bandits fugitifs, etc...) Cette croyance, dans certaines contrées, subsiste encore de nos jours.

Que des croyances aussi ridicules persistent pendant des millénaires, cela doit nous porter à réfléchir. Leur cause ne nous sera pas bien difficile à découvrir. C'est à l'ignorance, et surtout à la paresse intellectuelle, qu'il faut imputer la fortune de la baguette magique. Étudier, observer, comprendre, demandent trop de volonté et de labeur. Le paresseux préfère avoir recours au surnaturel, à la foi ; il se contente de faire des vœux pour que son choix soit le bon ― cela coûte si peu ! ― La foi, en des dieux ou en des humains, n'est qu'une sorte de baguette magique ; religion, parti, dogme, sont des murs derrière lesquels l'ignorance, fermant les yeux, se bouchant les oreilles, s'efforce de s'endormir.

On manque trop souvent du courage de chercher ses propres vérités ; on s'en remet trop souvent à un autre ― prêtre, orateur, écrivain ― du soin de résoudre le problème de notre existence. D'aucuns semblent même attendre, que, au hasard d'un suffrage ou d'un bouleversement social, une société parfaite surgisse des ruines du capitalisme. Tout ceci est aussi peu rationnel que d'aller, guidé par un rameau de pommier, à la découverte de quelque trésor enfoui dans la terre.

WASTIAUX.