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BARBARIE n. f. 

Manque de civilisation, dit-on généralement, et, par extension, cruauté, férocité, inhumanité. Cette définition bourgeoise est incomplète. Il est vrai que très souvent les peuples sauvages sont barbares, leur sensibilité étant encore très grossière. Mais la « civilisation » peut très bien, au lieu de supprimer la barbarie, la perfectionner et l'adapter à tous les progrès. C'est ainsi qu'on a vu, durant la tuerie mondiale de 1914-1918, les peuples « civilisés » user d'une effroyable barbarie les uns contre les autres. Au service de cette barbarie ont été mis tous les moyens et méthodes modernes, toutes les acquisitions de la science : avions, sous-marins, balles explosives, gaz asphyxiants, etc., etc., toutes les conquêtes de la « civilisation » ont participé au massacre. Oserait-on dire après cela que les peuplades sauvages du centre de l'Afrique nous sont supérieures en barbarie ? On sait, d'autre part, comment les puissances européennes entendent « civiliser » les colonies. (Voir Colonisation.) La barbarie n'est le propre, ni d'une race ni d'une nation. Chaque homme a en lui un peu des instincts de la bête. La véritable civilisation consisterait donc, pour l'individu, à réprimer ces instincts mauvais et à cultiver les sentiments de générosité, fraternité, bonté. Malheureusement, les gouvernements ― dont le pouvoir s'appuie justement sur la faiblesse humaine ― font leur possible pour développer les mauvais instincts des citoyens en créant des sentiments artificiels qui les couvrent (exemple : l'honneur militaire), et en nourrissant une mentalité déplorable. On ne peut donc compter sur une véritable civilisation que lorsque la Révolution sociale aura balaye les gouvernements et fait place nette. Lorsque les classes dirigeantes d'aujourd'hui auront été mises hors d'état de nuire, lorsque la paix mondiale sera assurée et que le Progrès se refusera à collaborer au meurtre et à l'esclavage des populations du globe, alors nous pourrons dire aux peuples encore arriérés : « Voyez les avantages de la civilisation ; faites comme nous : libérez-vous des routines et des préjugés. » II ne sera pas besoin, alors, de porter la guerre chez eux. L'exemple de notre vie facile et heureuse suffira aisément.