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BASILIQUE n. f. du latin basilica qui, pris dans le sens de tribunal, a donné aussi naissance au mot basoche

On a prétendu que le latin basilica avait eu lui-même son origine dans deux mots grecs désignant la maison du roi, spécialement la partie de cette maison où se tenaient les assemblées publiques et où se rendait la justice. De là, on a conclu qu'il n'y avait eu aucune différence dans ce genre de monuments chez les Grecs et chez les Romains. Mais on n'a jamais connu de basilique grecque. On a seulement cru pouvoir établir un rapport entre la basilique romaine et le portique grec, comme celui de Pœstum qui subsiste encore et qu'on a appelé improprement basilique de Pœstum, ne sachant quel nom donner à une colonnade qui n'était pas celle d'un temple.

Le portique grec a été à l'origine l'édifice attenant à l'agora d'Athènes sous lequel l'archonte-roi rendait la justice. On l'appelait portique du roi. À l'époque romaine, des écrivains traduisirent le latin basitica par les mots grecs signifiant maison du roi. Il est probable qu'il a existé en Grèce des constructions servant, comme les basiliques romaines, les loggie des républiques italiennes et les bourses d'aujourd'hui, d'abris aux gens d'affaires qui se réunissaient sur les places principales des villes. Il n'est pas resté de traces de ces constructions.

La basilique est donc essentiellement romaine. L'édifice est plus ancien que le mot. Sa forme primitive fut, dans les premiers temps de Rome, celle du lieu couvert où le Sénat se réunissait. Il y avait, au fond, une estrade sur laquelle, assis dans leurs chaises curules, les consuls rendaient la justice. Cette construction, qui était dans le voisinage du forum, en devint peu à peu le complément ; les gens d'affaires ou les promeneurs y trouvaient, contre le mauvais temps, un abri couvert, mais ouvert et sans murs, comme le portique grec. Elle s'agrandit suivant les besoins, s'élargissant par l'addition de portiques latéraux. C'est sans doute à la suite de ces agrandissements que le nom de basilique lui fut donné. Elle comporta alors, en général, une nef principale entourée de rangs de colonnes formant des allées. Les portiques de côté abritaient des boutiquiers et les gens de banque ou de commerce discutant de leurs affaires. Des places spéciales étaient réservées aux extrémités au tribunal. Au-dessus des bas-côtés, des galeries supérieures servaient de lieu de promenade pour les oisifs. Les basiliques devinrent des édifices de plus en plus somptueux par la beauté de leur architecture, leurs dimensions et leur richesse. Elles furent décorées de statues, de trophées, d'œuvres d'art diverses en bronze et en matières précieuses.

À propos de la basilique Ulpienne, Pausanias écrivait au IIe siècle : « À Rome, le lieu où l'on rend la justice surprend par sa grandeur et sa magnificence ; ce qu'on y admire le plus, c'est un plafond de bronze qui règne d'un bout à l'autre. » Le plus ancien de ces monuments était la basilique Porcia construite au Nord du forum en l'an de Rome 570 (184 ans avant J.-C.). Il reste un grand nombre de basiliques romaines en Italie et en Afrique. Celle de Pompei est la seule qui subsiste encore sans altérations.

Quand le Christianisme fut sorti des catacombes et que Constantin en eut fait la religion officielle de l'empire romain, il concéda aux évêques plusieurs basiliques, entre autres celle que le sénateur Lateranus avait fait construire au temps de Néron. Transformée en église, elle devint la première basilique de Saint­ Jean-de-Latran. C'est à partir de cette époque que le nom de basilique fut donné à certaines églises, anciennes basiliques romaines transformées ou constructions nouvelles établies sur le modèle romain. Dans la basilique chrétienne, la forme antique demeura, mais l'église proprement dite fut fermée par des murs. Les galeries latérales furent arrêtées avant la nef et séparées d'elle par une ouverture transversale formant avec cette nef une croix ; une arcade en voûte placée sur des colonnes fut substituée à l'architrave. Cette substitution n'avait pas eu d'exemple dans l'antiquité et servit de type aux architectures qui suivirent : byzantine, romane, gothique.

Les chrétiens adoptèrent volontiers les basiliques romaines pour en faire leurs principales églises en raison de leurs vastes dimensions permettant de réunir de grandes assemblées de fidèles. De plus, l'usage qu'on avait fait avant eux de ces monuments ne leur était pas odieux, comme celui des temples qui avaient servi au paganisme et qu'ils s'employaient à détruire avec celui-ci. Les premières basiliques chrétiennes et les plus célèbres furent celles de Saint-Laurent, Sainte-Agnès, Saint-Paul, hors des murs de Rome. Elles furent imitées ensuite par celles plus somptueuses de Sainte-Marie Majeure et de Saint-Jean de Latran. La basilique chrétienne continua ainsi celle des Romains. À Rome, les églises dénommées basiliques restent toujours ouvertes, alors que les autres églises sont fermées à certaines heures.

Au moyen âge, on appela aussi basiliques des chapelles consacrées aux martyrs, des oratoires privés et des édicules élevés sur les tombeaux des grands.

On continue aujourd'hui à donner le nom de basiliques à de très grandes églises, et aussi, par une substitution pompeuse des termes, à des églises qui ne sont très grandes ni par leurs dimensions ni par leur beauté.

Palladio appela basiliques des constructions de la Renaissance ayant une destination semblable à celle des basiliques romaines. Le terme fut ensuite réservé de plus en plus à des édifices du culte et on donna les noms de palais de justice, hôtels de ville, bourses, etc..., aux monuments où se rendait la justice, où se traitaient les affaires publiques et celles de la banque et du commerce. 

― Edouard ROTHEN.

Bibliographie : Dictionnaire National ou dictionnaire universel de la langue française, par Bescherelle aîné (Paris, 1856). ― Dictionnaire de l'Académie des Beaux-Arts (Paris, 1868). ― Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, par Daremberg et Saglio (Paris 1877).