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COLONIE n. f. - COLONISATION n. f. 

Si vous cherchez dans les livres des géographes et des économistes, la définition de ces deux mots, et surtout du mot « colonisation », vous y trouverez à peu près ceci : « On donne le nom de colonisation à une forme particulière de l'émigration, par suite de laquelle le pays où s'établissent les émigrants est approprié et fécondé par leur labeur, et voit, grâce à eux, toutes ses ressources se développer de la manière la plus complète. La colonisation résulte donc de mouvements d'hommes civilisés à divers degrés et de diverses manières dans des contrées différemment traitées. » D'où il résulte, toujours d'après les géographes et les économistes, que cet effort peut donner naissance à deux sortes de colonies : 1° Les colonies de peuplement ; 2° les colonies d'exploitation.

Les premières comprennent celles dont les conditions de climat et de nature permettent l'établissement à demeure des immigrants, leur acclimatement et la fondation d'une famille.

Les colonies d'exploitation, au contraire, sont celles où le climat interdit de s'y fixer sans esprit de retour aux immigrants, qui doivent se borner à exploiter, par le commerce, et encore temporairement, les produits du pays. Avec un peu plus de franchise, certains économistes appellent ces dernières colonies de « conquête ».

Telle est dans son essence même, et avec toute son hypocrisie la doctrine adoptée par les Sociétés capitalistes et bourgeoises, commentée dans les livres et enseignée officiellement dans les écoles.

Telle n'est pas la doctrine de celui qui, l'esprit et le cœur épris de justice et d'humanité, a pénétré lui même jusqu'aux réalités qui se cachent dans cette phraséologie livresque.

Par son importance et les développements qu'elle exige, cette question, qui est toute la question coloniale, ne saurait être traitée en un seul article. Considérée ici dans sa généralité, elle sera reprise pour être épuisée aux mots : Guerre (coloniale), Impérialisme (colonial), Sadisme (colonial).

Avec ces trois mots, sera faite à peu près intégralement l'histoire de la colonisation capitaliste et bourgeoise.

Il suffira de dire aujourd'hui que, d'une façon générale, cette histoire, c'est-à-dire l'effort colonial des peuples prétendus civilisés, est tout entière dominée par l'abominable conception des races supérieures et des races inférieures : les premiers ayant sur les seconds tous les droits que donne la Force.

C'est au nom de cette conception, remplaçant celles d'Humanité et de Justice que l'on continue, et que l'on continuera longtemps à exploiter la faiblesse à imposer comme unique loi aux pays colonisés (lisez : conquis), le bon plaisir du soldat et comme unique régime : le massacre, la spoliation et le vol.

(Voir les mots Guerre, Impérialisme, Sadisme.)

P. VIGNÉ D'OCTON.