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COMMANDEMENT n. m. 

Action de donner un ordre ; de commander. S'exerçant toujours de « supérieur » à « inférieur », le commandement suppose implacablement l'autorité, car on ne peut concevoir le commandement sans qu'immédiatement s'y l'attache l'idée d'autorité. (Voir Autorité.) L'autorité est donc à la base du « commandement » et divise l'humanité en deux fractions : les maîtres, d'un côté, et les esclaves, de l'autre. Le commandement est aveugle, et le fait d'être investi du droit de commander n'implique nullement la capacité et la compétence ; il suffit uniquement, pour commander, d'être pourvu d'un appareil de répression, au cas où « l'inférieur » se refuserait à exécuter l'ordre du « supérieur ». Anciennement, on donnait, comme symbole de leur autorité, un bâton aux officiers investis d'un commandement. Aujourd'hui, le bâton a disparu, mais, hélas ! le commandement subsiste. Il y a une hiérarchie dans le commandement. À l'usine, au chantier, à l'atelier, elle prend naissance au chef d'équipe et s'étend jusqu'au directeur ou au Conseil d'administration ; dans la magistrature, elle part du simple agent de police pour aller jusqu'au président d'un quelconque tribunal ; mais c'est surtout à l'armée que cette hiérarchie de commandeurs accomplit ses tristes méfaits : du petit caporal au puissant ministre de la guerre, chacun s'empare d'une parcelle d'autorite qui retombe invariablement sur l'échine du pauvre troupier, et, du plus petit au plus grand, tout ce monde commande au nom de la discipline militaire.

Et, pourtant, y a-t-il quelque chose de plus stupide que ce commandement ? Selon les principes de l'autorité, l'ordre à exécuter ne doit pas l'être en vertu de son utilité ou de sa logique ; mais en raison directe de la qualité hiérarchique de celui qui le donne. Tout se déplace en vertu du pouvoir de commander : l'intelligence n'a plus son siège dans le cerveau, mais est relative au grade qui nous est conféré dans la vie civile ou militaire. Un caporal est plus intelligent qu'un simple soldat et un capitaine qu'un caporal, cela ne doit faire aucun doute. Il faut l'accepter comme axiome ; et, quels que soient les ordres donnés, aussi ridicules fussent-ils, il faut, sans discuter, les exécuter et s'incliner devant le commandement. Selon certains savoir commander est un art ; ce n'est pas un art, c'est une bassesse et une lâcheté, et il est encore plus méprisable d'exercer le commandement que de le subir. Du reste, tous ceux qui consentent à commander sont capables également de s'abaisser devant des supérieurs. Autant Ils sont féroces pour ceux qui sont placés au-dessous d'eux, autant ils sont généralement plats devant ceux qui occupent un poste plus élevé. Commander et obéir sont des crimes et l'homme libre se refuse à l'une et à l'autre de ces contraintes. (Voir Anarchiste.)