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DESSIN n. m.

Le dessin est l'art d'imiter, en se servant de lignes, la forme des choses, des objets, des individus. Avec la musique, le dessin a dû être le premier des arts, car s'il fut de tous temps naturel à l'homme de manifester sa joie ou sa peine, sa gaîté ou sa tristesse, par des cris, des sons, des intonations, aux époques reculées de l'humanité, alors que les progrès de la civilisation n'avaient pas encore apporté à l'individu un bagage suffisant de connaissances, le dessin a été pour lui l’unique moyen de conserver la forme d'êtres ou d'objets qui lui étaient chers, ou encore de manifester ses désirs et ses besoins lorsque la parole n'arrivait pas à refléter sa pensée.

Certains historiens prétendent que le dessin fut inventé par une jeune fille grecque qui, voulant conserver les traits de son amant, traça sur le mur le contour le son ombre. Cette explication est sans fondement et il nous semble que l'on ne peut attribuer à personne l’invention du dessin qui se perd dans la nuit des temps ; le plus raisonnable est de supposer que, aux âges les plus lointains de l'histoire, l'homme a cherché à imiter, sur le sable ou sur la pierre, l'image qui se présentait à lui sous une forme quelconque.

Ce qui est certain, c'est que le dessin a précédé la sculpture et la peinture, dont il est le principe fondamental et, bien que peu expressif et plutôt grave, il présentait déjà un certain esprit artistique chez les Egyptiens. Il acquit par la suite de la souplesse, de la beauté et de l'élégance pour arriver à atteindre de nos jours au plus haut degré de perfection.

Il y a plusieurs sortes de dessins. Le dessin au crayon, à la plume, à l'estompe, etc., etc., mais, quelle que soit sa qualité, il nécessite de la part de celui qui l'exerce une connaissance assez étendue de l'anatomie, de la perspective et de l'expression, pour rendre et reproduire les caractères, les mouvements et les gestes d'une façon naturelle et artistique.

Le dessin n'offre pas seulement des satisfactions à la vue et à l'esprit, il trouve aussi son utilité dans l'industrie. Les progrès de la science, et plus particulièrement du machinisme dans toutes ses manifestations, nécessite l'emploi d'une armée de dessinateurs, qui ne doivent pas être seulement des artistes, mais aussi des techniciens. La connaissance du dessin géométrique facilite la tâche de l'ouvrier qui a à fabriquer une pièce quelconque et son étude ne saurait trop lui être recommandée, car i1 tient lieu de parole et d'écrit dans tous les arts mécaniques.

Le dessin est donc un art utile et agréable, qui nous offre de multiples jouissances à tous les moments de notre existence. Si la maison que nous habitons a été, avant d'être bâtie, dessinée sur le papier par les soins de l'architecte, le papier peint qui couvre les murs de nos appartements et qui égaie un peu le modeste logis du travailleur, est également dû au dessin de l'artiste ignoré et inconnu qui a su combiner les quelques couleurs mises à sa disposition. Et il en est de même pour les étoffes que nous portons, pour les broderies et les dentelles qui ornent le linge, pour les tapis, enfin pour tout ce qui nous entoure et flatte notre vue. Le dessin est donc utile, nécessaire, indispensable au peuple, puisqu'il lui procure certaines satisfactions et si tous les dessinateurs ne sont pas de très grands artistes et si les Michel Ange, les Léonard de Vinci et les Raphaël, sont rares, il n'en est pas moins vrai, que nous bénéficions à chaque instant, du travail des modestes artisans, qui, à la plume ou au crayon, exécutent pour nous, pour frapper notre sensibilité, une figure ou une fleur, un animal ou un paysage, ou tout autre objet imaginaire.

Pourquoi faut-il que comme celui de l'écrivain et du journaliste, le crayon du dessinateur se prostitue et se prête à l'accomplissement d'œuvres inhumaines? L'avion qui viendra demain bombarder les villes et les campagnes, le canon qui crachera sa mitraille, furent, eux aussi, exécutés sur le papier, avant d'avoir été façonnés par la main de l'ouvrier. Chacun, hélas!, a sa part de responsabilité dans les actions nuisibles qui engendrent les désastres et les catastrophes, et ce n'est que par l'accord du travailleur manuel et intellectuel, qui ont chacun, leur place et leur utilité dans la société, que l'on arrivera, un jour, à vivre harmonieusement. Alors, le dessin célèbre de Villette représentant des anges bourrant la gueule du canon avec des gerbes de blé, ne sera plus un rêve mais une réalité.