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GALÈRE n. f. (de l'italien Galera)

Navire de guerre des anciens, à un, deux ou trois rangs de rames. Les plus petits de ces navires avaient, à chaque rang et de chaque côté, dix rames ; les plus grands en avaient cinquante. En France, les premières galères furent construites sous le règne du roi Charles IV. Le mot galère est aujourd'hui usité comme synonyme de « bagne ». Cela tient à ce qu'il fut un temps où les forçats accomplissaient leur peine sur les galères. « C'était, dit le Lachâtre, la peine la plus communément usitée. Les femmes ne pouvaient être condamnées aux galères. On commuait cette peine tantôt en une détention à temps ou à perpétuité, le plus souvent en celle du fouet et du bannissement. Voici comment s'exécutait cette peine : les condamnés, après avoir été préalablement fustigés et flétris, étaient transférés dans une prison jusqu'à ce qu'ils fussent en nombre suffisant pour former une chaîne. On leur passait alors un anneau de fer au cou, un autre au bas de la jambe ; on reliait ces deux anneaux par une chaîne qui tenait, d'une part, à l'un des poignets, de l'autre à la grosse chaîne, à laquelle les galériens étaient attachés deux à deux, l'un à droite, l'autre à gauche. Ils marchaient ainsi à pied, de ville en ville, sous la garde de chiourmes, jusqu'au lieu de leur destination où, étant arrivés, on les détachait de la grosse chaîne pour les enchaîner dans la galère, chacun à son banc. En 1748, les navires à rames ayant cessé d'être en usage dans la marine, les galériens furent employés aux travaux des ports et des arse­naux. »

De nos jours, il ne reste donc plus des « galères » que le nom. Les forçats ne sont même plus employés dans les arsenaux, mais expédiés dans de lointaines colonies pénitentiaires et livrés, sans contrôle, à la brutalité des gardes-chiourmes. (Voir les mots bagne, travaux forcés, forçat).

Le mot galère est également usité à présent, au sens figuré, pour signaler une condition désagréable ou une situation pénible. Une vie de galère. Un travail de galère. Il n'est pas besoin d'aller au bagne pour voir des hommes condamnés à la galère perpétuelle. Face à la richesse insultante des riches, il est des êtres qui fournissent un travail au-dessus des forces humaines et mènent une véritable vie de galériens. Il faut avoir visité certaines contrées minières ou pénétré dans certaines grandes usines métallurgiques pour se rendre compte de ce que le capital exige de son prolétariat, en échange d'un salaire insuffisant pour vivre ; l'existence de certains manœuvres, qui travaillent sur les grands navires commerciaux, n'est pas non plus de beaucoup supérieure à celle des galériens de jadis ; à part les chaînes elle est à peu près identique. Que de chemin il reste encore à parcourir pour que la terre, qui est un paradis pour une minorité, ne soit plus une galère pour la grande majorité ! C'est au prolétariat, parce que c'est chez lui que se recrute le galérien, qu'il appartient de transformer tout cela. Avec un peu d'énergie, de volonté et de courage, il le peut; mais il faut aussi pour cela qu'il se libère de tous les préjugés qui le tiennent, comme un galérien, rivé à la chaîne.