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INVESTITURE n. f. (lat. investire, revêtir, de in, sur et vestis, vêtement)

C'est l'action de revêtir, de mettre en possession, d'investir quelque personnage d'un fief, d'un immeuble, d'un bénéfice, d'une dignité ecclésiastique. L'investiture s'accompagnait d'ordinaire d'un cérémonial réglé par la tradition, et comportait une célébration de caractère rituel.

Aux termes du droit féodal, le seigneur donnait à son vassal l'investiture, marquée par quelque remise symbolique (lance, couronne, rameau, etc.), signe de la propriété ou du pouvoir. La crosse et l'anneau, remis aux évêques par les princes - autorités profanes - étaient, pour ces dignitaires, le signe de l'investiture. Les papes donnaient, en échange, l'investiture des royaumes... Le pouvoir régnant, passant outre aux élections, en vint à détenir la disposition même des évêchés, des abbayes. Des scandales - en Allemagne surtout - marquèrent les répartitions des charges, octroyées à des courtisans, conférées avec « simonie ». La querelle des Investitures mit aux prises, pendant un demi-siècle, en conflits sanglants, les papes et les empereurs d'Allemagne. En dépit d'un long usage et du blanc-seing d'un concile, Grégoire VII et ses successeurs sur le trône de saint Pierre firent tout pour dessaisir les princes séculiers des prérogatives d'une investiture qui s'étendait jusqu'aux papes. Fixée « par le sceptre » par le concordat de 1122, l'investiture fut faite bientôt de vive voix ou par écrit... La lutte aboutit au principe de la séparation des pouvoirs et accentua la démarcation du temporel et du spirituel (Voir Histoire des Papes).

Empruntons au Lachâtre cet exposé des investitures en matière de biens : « La translation de la propriété fut, chez tous les peuples, entourée de pratiques symboliques, de formalités solennelles. Pour valider une aliénation, on avait recours à des signes extérieurs destinés à annoncer, de la part de celui qui aliénait, l'intention de se démettre de son droit de propriétaire, et, chez celui auquel la cession était faite, la volonté de devenir propriétaire. Ces signes furent primitivement déterminés par les lois et par les coutumes ; en général, on choisit les symboles qui eurent le plus de rapports avec la chose transmise ; la translation d'un champ, par exemple, fut indiquée par la remise d'une motte de terre, par celle d'une touffe de gazon, prise dans ce champ, aux mains de l'acquéreur : et, pour exprimer que ce n'était pas le sol tout nu qui était ainsi aliéné, on ajoutait aux premiers symboles une branche d'arbre pour exprimer les produits de la terre, un bâton pour marquer l’autorité du maître. On ajouta quelquefois la remise d'un couteau, afin d'indiquer le pouvoir de couper, de disjoindre, etc. (jus utendi et abutendi). Il y avait une foule d'autres formes d'investiture. Ducange et Carpentier donnent des exemples de cent deux manières différentes, suivant la nature de la chose transférée, du droit cédé. (Disons, en passant, que la propriété a subi, depuis 1789, des modifications qui ont rendu absolument inutiles ou impossibles ces vieilles formes). L'investiture s'effectuait par le glaive, par l'anneau, par la bannière, par la crosse, par les cordes des cloches, etc. Les symboles de transmission étaient soigneusement conservés par les parties mises en possession. On les annexait parfois aux actes et contrats afin de rendre les conventions plus sacrées, plus difficiles à rompre. Par contre, on brisait aussi parfois les symboles pour indiquer la ferme résolution de ne jamais revenir sur ce qui avait été fait ». Dans le droit public, au moyen âge, les investitures, tant laïques que religieuses, occupent une place considérable.