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LACUNE n. f. (latin lacuna : proprement petit lac, de lactus, lac)

Espace vide dans l'intérieur d'un corps. Les corps lacunaires (minéralogie) sont composés de cristaux agglomérés qui laissent entre eux des intervalles. En botanique, on désigne ainsi des cavités pleines d'air qui constituent des solutions de continuité dans le tissu cellulaire des plantes. Par suite de l'accroissement plus rapide dans un sens que dans un autre ou de la destruction d'une partie du tissu végétal, la tige des graminées, des bambous par exemple, se creuse intérieurement et les sucs déposés en nœuds y limitent des espaces fistuleux irréguliers. Ailleurs, comme dans le noyer, la moelle du canal médullaire se rompt, laissant entre ses fragments des lacunes occupées par des gaz. En anatomie, on donne ce nom à des cavités des membranes muqueuses dont les parois secrètent une humeur visqueuse...

Par analogie, on appelle ainsi une solution de continuité, une interruption dans le corps d'un ouvrage ou le texte d'un auteur. Il y a, par exemple, dans la chronologie des anciens empires d'Orient des lacunes devant lesquelles les érudits demeurent perplexes. « Parmi les ouvrages qui nous sont venus de l'antiquité, un assez grand nombre en effet sont incomplets et présentent des lacunes qu'on ne pourra sans doute jamais remplir. En des siècles où l'imprimerie était inconnue et où les œuvres manuscrites étaient très rares, comparativement à nos produits typographiques, il est arrivé que de précieux écrits se sont perdus en totalité ou en partie. Les chrétiens des premiers siècles n'ont pas peu contribué à la destruction de ces monuments anciens, qui n'étaient à leurs yeux que des œuvres ennemies de la religion nouvelle et, par conséquent, dignes d'être anéanties. Les moines utilisèrent parfois les vieux manuscrits profanes, pour y écrire des psaumes, des compositions ascétiques, etc... On est parvenu à retrouver, sous leur écriture, les textes primitifs, et c'est ainsi que plusieurs ouvrages, on parties d'ouvrages importants, ont échappé à l'oubli. Il y a des lacunes dans Aristote, dans Tite-Live, dans Vélléius Paterculus. Des copistes, voulant réparer des lacunes, ont souvent mis beaucoup d'inepties là où il y a lieu de croire que les auteurs avaient mis d’excellentes réflexions. Le roman grec de Daphnis et Cloë, par Longus, offrit, jusqu'à P.-L. Courier une lacune considérable, dont ce savant helléniste découvrit le texte dans un manuscrit de la bibliothèque de Florence. L'histoire des Egyptiens présente de nombreuses lacunes » (Lachâtre). Ceux qui admettent, ou estiment possible, l'existence de Jésus-Christ, rencontrent dans sa vie, entre douze et trente ans, une lacune qui accroît singulièrement le nombre des conjectures formées sur la période de gestation du christianisme. Les siècles ont ainsi, comme les souvenirs humains, des lacunes susceptibles de n'être jamais comblées.