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MOBILISÉ n. m.

L'homme qui, déjà sous les drapeaux, fait partie du nombre des soldats qui sont ou vont être envoyés à la frontière pour une période de présence, d'activité que déterminent les circonstances, la gravité, et la durée des hostilités. La guerre de 1914 - 1918 a maintenu pendant plus de quatre ans des hommes qui croyaient quitter leur foyer pour un laps de temps très court. Il en est qui, mobilisés en 1914, ont fait toute la guerre, bien qu'ils eussent depuis long temps passé l'âge de compter avec l'armée active. En revanche, il en est d'autres, et non des moins aptes, qui furent embusqués en des emplois de tout repos ou des besognes anodines, loin du front et de ses dangers. Ces mobilisés spéciaux n'étaient pas toujours les moins enthousiastes à vouloir la guerre jusqu'au bout. Mais, en général, le mobilisé, non protégé, non privilégié, non débrouillard, fut toujours – brave ou résigné – un malheureux condamné. S'il échappa, par hasard, à la mort, il peut se proclamer, parmi tant de victimes de la guerre, un heureux rescapé. Si, de plus, il a pu sortir de cet enfer sans être endommagé ni physiquement, ni moralement, il lui reste un devoir à remplir : ce n'est pas celui de se vanter et de se glorifier, mais celui de proclamer à tous et partout l'horreur de la guerre. Celui qui a vu, qui à vécu, qui a souffert de ce mal horrible qu'est la guerre n'a pas le droit de rester muet. Il doit dire ce que fut l'ignoble tuerie de quatre années voulue par de vieux routiers et des habiles de la politique et des affaires, subie par de jeunes hommes ignorants ou trompés. Blessé ou non, le revenant de la guerre doit être l'acharné militant contre la guerre. Il doit combattre les guerriers professionnels qu'il a vus à l'œuvre et qui ne sont pas restés nombreux, ceux-là, parmi les hécatombes. S'il a l'esprit critique, s'il a des facultés intellectuelles suffisantes, il se doit de vouloir apprendre et faire connaître les causes et les responsables de la guerre pour les dénoncer hautement, par toutes les manières qu'il croit les plus justes et les meilleures pour convaincre les plus obtus. Voilà quelle doit être la vraie besogne glorieuse du mobilisé, démobilisé.

– G. Y.