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MOLÉCULE n. f. (du latin fictif molecula, diminutif de moles, masse)

Signifie donc petite masse, petite particule de matière. Cette définition prête à confusion : on pourrait, en l'adoptant, être conduit à confondre atomes et molécules, qui seraient ainsi pris indifféremment les uns et les autres pour désigner les parties constituantes de la matière. Le véritable sens précis auquel s'est arrêté la chimie moderne est le suivant : La molécule est la limite de la divisibilité de la matière. Choisissons un exemple.

Prenons un morceau de cristal de roche (quartz) ; à l'aide d'un marteau divisons-le en fragments de plus en plus petits. Chacun des dits fragments continuera à présenter les propriétés physiques et chimiques du quartz : ses facettes feront entre elles des angles dièdres invariables qui se rencontreront dans le plus petit fragment. Quand il ne nous sera plus possible de pousser la division du cristal de roche envisagé, jusqu'à en obtenir une particule qui ne pourrait plus être décomposée en éléments quartz, nous aurons obtenu une molécule de quartz. La molécule est ainsi la plus petite quantité d'un corps qui puisse exister à l'état libre. C'est donc, ici, la plus petite quantité de quartz qui puisse exister. Si, au cours de modifications nouvelles, une molécule de quartz change, ce n'est plus une molécule de quartz. La substance formée est aussi dissemblable du quartz qu'elle peut l'être. La science moderne nous a révélé que les molécules sont elles-mêmes composées d'éléments plus petits encore appelés atomes (voir ce mot) lesquels seraient eux-mêmes divisibles en particules plus ténues encore : ions et électrons. Les atomes restent la plus petite quantité d'un élément qui puisse exister dans la molécule.

La matière de tous les corps, et par conséquent la matière universelle, est formée par l'agrégat des molécules, elles-mêmes constituées d'atomes. Lorsque tous les atomes d'une molécule sont les mêmes, nous nous trouvons en présence des corps « simples » ou éléments tels que le fer, l'oxygène, etc. Quand les atomes entrant dans la constitution des molécules sont différents, nous avons des corps « composés » : amidon, sulfate de cuivre, albumine, pyrite de fer, etc. Entre les molécules d'un corps existent des espaces intermoléculaires dont les dimensions sont plus grandes que celles des molécules, tout comme il y a, dans les molécules, des espaces inter-atomiques. Tous ces espaces sont occupés par l'éther. Dans la masse de la matière, les molécules et dans celle des molécules, les atomes sont animés d'un mouvement extrêmement rapide, échappant à nos sens et sans lequel la matière n'existerait pas. On a l'image de cet état de choses dans le Cosmos, où les astres sont – toutes proportions gardées – comme les molécules d'un corps et maintenus dans l'espace par leur mouvement perpétuel. L'agitation des molécules échappe à notre perception directe ; mais elles sont animées de mouvements très vifs et désordonnés. Ce mouvement incessant des molécules, particulier à toute la matière, auquel on a donné le nom de mouvement « Brownien » ne s'arrête jamais. Il est éternel et spontané.

Il nous est pour ainsi dire impossible de connaître le poids absolu et la grandeur des molécules. On ne peut saisir entre elles que des rapports de poids et de volume. Ces rapports constituant la connaissance des poids et des volumes moléculaires sont rapportés à une unité constante : le poids d'un atome d'hydrogène. Les molécules des différents corps pèseront donc plus ou moins que l'atome d'hydrogène, lequel pèse notablement moins « que le milliardième de milliardième de milligramme ». (J,. Perrin : les Atomes.)

Il nous est difficile de nous faire une idée de la petitesse des atomes constitutifs des molécules – deux atomes au moins devant être réunis pour constituer une molécule. – Dans une tête d'épingle ordinaire, il y aurait 8 sextillions d'atomes (8000 milliards de milliards). Un millimètre cube d'hydrogène contiendrait 36 millions de milliards de molécules. Et un millimètre cube d'éther renferme d'après Clausius et Maxwell, 7716 x (10 élevé à la 54ème puissance) d'atomes ou 7716 suivi de 53 zéros !

La vitesse avec laquelle se meuvent les molécules a été évaluée a 1698 mètres par seconde pour l'hydrogène, tandis que pour les gaz plus lourds, elle varie avec le poids tout en diminuant d'une façon notable.

La chimie moderne ne saurait se passer actuellement de la théorie atomique ; sans elle toutes les conceptions qu'elle renferme s'écrouleraient. Ce n'est cependant qu'une hypothèse ; nous n'avons aucune idée réelle de ce qu'est un atome. Nous ne savons rien de sa constitution, de sa forme, de son poids réel, de sa position, de sa couleur. Mais, venue de l'Antiquité jusqu'à nos jours, toujours perfectionnée, et vivante, confirmée et renouvelée par les travaux modernes sur la radioactivité, elle a l'avantage énorme d'être un instrument fécond dont les fruits et les applications sont nombreuses et bienfaisantes et c'est grâce à elle que le problème de la matière a cessé d'être un problème métaphysique, pour devenir de plus en plus un problème d'ordre expérimental et positif.

– Ch. ALEXANDRE.