MONOPOLE
n. m. lat : monopolium, (du grec, monopôlion, de
monos, seul, et pôlein, vendre)
Étymologiquement, c'est donc le privilège pour un individu, un groupe, une organisation d'être seul à vendre tel ou tel produit. Le sens s'en est étendu aux faits sociaux, aux actes économiques les plus divers. On dit maintenant tout aussi bien le monopole de la vente, ou de l'achat, de la fabrication, de l' extraction, le monopole de l'enseignement, etc. Mais à ce mot s'attache toujours le même caractère d'exclusivité, qu'il s'agisse des faits, de l'usage ou du droit. Pratiquer un monopole consiste (soit légalement) avec l'aide du gouvernement ou de privilèges reconnus et protégés par la loi, (soit en fait par une organisation puissante) a supprimer toute concurrence sur telle ou telle opération économique déterminée.
Proudhon dénonçait déjà vigoureusement « l'égoïsme monopoleur ». Il disait : « Le monopole est, pour l'homme qui ne possède ni capitaux, ni propriété, l'interdiction du travail et du mouvement, l'interdiction de l'air, de la lumière et de la subsistance... Le monopole s'est enflé jusqu'à égaler le monde ; or un monopole qui embrasse le monde ne peut demeurer exclusif, il faut qu'il se républicanise ou bien qu'il crève. » Il signifiait ainsi au monopole total (capitalisme particulier ou d'État) l'impossibilité d'exister. Le monopole symbolisait à ses yeux cette redoutable tyrannie économique dont notre siècle aura vu l'apogée et, souhaitons-le, la défaite.
On range généralement les monopoles dans trois catégories : les monopoles naturels, les monopoles fonciers, les monopoles légaux. L'économie moderne s'est enrichie de monopoles de fait.
Les premiers se rapportent aux inégalités naturelles, aux capacités de tout ordre qui différencient les hommes (force physique, adresse, aptitudes techniques, intelligence, volonté, etc). Ce « privilège devant la vie » influence les vertus productrices et tend à commander la rémunération de l'effort. Pour ce qu'il écrase le défavorisé naturel, les écoles socialistes se sont élevées contre ce monopole. Elles tendent à lui substituer une économie compensatrice dont la formule « De chacun selon ses forces, à chacun selon ses besoins » est l'expression la plus large. Quelques essais fragmentaires n'ont pu démontrer la valeur de ce correctif, non plus que l'infirmer. Il a pour lui nous semble-t-il, la vertu d'introduire l'équité humaine là où la naissance a prodigué un choquant et douloureux déséquilibre. Mais il reste à trouver les modalités heureuses qui assureront la vitalité du principe...
Les monopoles fonciers ont trait à l'appropriation privée du sol (nous les reverrons à ce dernier mot). On sait déjà quels dangers fait courir à la collectivité un tel accaparement. Moins sensible dans les pays où la propriété est fortement divisée, son arbitraire éclate dans un pays où – comme hier en Russie et aujourd'hui encore en Angleterre – la richesse foncière est entre les mains d'une poignée de hobereaux...
Les monopoles légaux qui sont par excellence les monopoles d'État et ceux dont l'État garantit à des particuliers l'exercice et le fruit, ont pour eux l'apparence de la légitimité, puisqu'ils fonctionnent sous l'autorisation et le contrôle de l'autorité légale. On a vu suffisamment en cet ouvrage quelles illusoires garanties offre cette autorité pour qu'il soit inutile de faire ressortir que ces monopoles – sous le couvert du bien public et de l'intérêt général – ou poursuivent un but purement fiscal et assurent, indirectement et hypocritement, une pressuration intense du contribuable, ou ramènent entre des mains privilégiées les avantages d'exploitation dont tous les bénéfices devraient revenir à la nation. Ceux du tabac, des allumettes, de la monnaie, de certaines administrations sont du type du premier ordre. Ceux des mines, des chemins de fer sont caractéristiques du second.
Le monopole d'État n'est qu'un impôt déguisé. S'emparant du commerce d'un objet de consommation, l'État en interdit la fabrication, l'échange et la vente dans le commerce libre et, naturellement, conserve pour lui tous les bénéfices de l'opération. Ces monopoles d'État sont une véritable exploitation du consommateur qui paie fort cher des produits médiocres. On voit couramment les produits monopolisés, de très mauvaise qualité, être vendus plusieurs fois leur valeur réelle, tels les allumettes et le tabac en France. Incapacité, négligence, mépris souverain du public président librement aux fabrications d'État. N'a t-on pas vu « notre » manufacture nationale employer, pour ses allumettes, des bois ignifugés ?... Le consommateur ne peut ni se défendre, ni s'adresser à un concurrent. Notre maitre, l'État, seul arbitre, est aussi notre unique et couteuse Providence...
Il est assez curieux (et aussi significatif) que des partis politiques, dits d'avant-garde (socialistes, radicaux-socialistes) aient inscrit dans leurs programmes, la consolidation des monopoles d'État existants et l'extension du principe de monopole à d'autres produits. On peut aisément se rendre compte, par le fonctionnement des monopoles existants, que le consommateur serait livré pieds et poings liés aux fantaisies d'une administration complètement irresponsable.
Quant aux « monopole de consentement » – concessions d'exploitation délivrées à certains individus ou, plus fréquemment, à des compagnies exploitantes – ils constituent une véritable escroquerie au détriment du public. Beaucoup de services publics d'intérêt général sont ainsi mis sous la coupe d'une poignée d'exploiteurs. Exemples probants : les monopoles accordés aux compagnies de chemin de fer, tramway, gaz, électricité. Ces compagnies commencent généralement à se faire octroyer de très fortes subventions d'établissements par les pouvoirs publics, État, départements ou communes. Les actionnaires fournissent le reste. Ensuite, par des conventions ou avenants passés avec les dits pouvoirs publics, elles majorent fortement les tarifs de la consommation, sous prétexte d'amortissements. Enfin, elles se font réserver des garanties
d'intérêts ; c'est à dire que les pouvoirs publics s'engagent à couvrir les déficits éventuels. Les Compagnies de chemin de fer, en France, ont ainsi reçu de l'État un chiffre élevé de milliards. On peut dire que le terrain que le terrain, les voies, le matériel et les bâtiments ont étés payés par l'État, c'est à dire par les contribuables, ce qui n'empêche pas que tout cela demeure la propriété exclusive de la Compagnie concessionnaire.
Je pourrais citer également les exemples de plusieurs compagnies de gaz. Par une majoration des tarifs du prix du mètre cube et de locations d'appareils, elles amortissent toute la valeur de leurs usines, matériel, canalisation, etc., en quinze ou vingt années. Certaines fonctionnent depuis trois quart de siècle et ont ainsi amorti trois ou quatre fois leur capital. Le montant des actions a même, en certains cas, été remboursé intégralement. De nouvelles actions ont été délivrées à titre gratuit aux anciens actionnaires, représentant l'augmentation réelle du capital – nouvelles installations, nouveau bâtiments, etc. – réalisée avec les bénéfices des exercices. Les consommateurs, qui n'ont pas la possibilité d'aller se fournir ailleurs, qui sont scandaleusement rançonnés, qui n'ont pas la faculté de protester, ont payé le capital initial, ont payé les améliorations ultérieures, ont tout payé, et ce sont les actionnaires qui restent propriétaires de l'exploitation. Ceci constitue une véritable escroquerie, mais escroquerie couverte par les lois et les conventions ayant force de lois.
Dans un pays comme la France, des milliards sont annuellement extirpés à la consommation, des fortunes s'échafaudent, sous le couvert du monopole, soi-disant instauré dans l'intérêt public.
Il va sans dire qu'entre les politiciens détenteurs de fonctions publiques et les dirigeants des compagnies à monopole, c'est le régime des tractations louches et malhonnêtes, des pots-de-vin, qui est la règle normale. Pour modifier, à leur avantage, tell ou telle clause de la convention, les dirigeants de la compagnie n'hésitent pas à récompenser largement le politicien qui leur facilite l'opération.
Ce genre de monopole a une autre conséquence très importante au point de vue de l'économie sociale : il constitue une entrave sérieuse au développement du progrès technique. Telle invention nouvelle, par exemple, ou quelque perfectionnement peut amener un produit concurrent à diminuer la consommation du produit monopolisé. Pesant de toute la force de leurs relations, les compagnies à monopoles font décréter des mesures pour tuer dans l'œuf cette concurrence.
Le transport des produits lourds par voie fluviale a été très entravé par les Compagnies de chemins de fer, lesquelles ont fait pression sur les gouvernants pour qu'on ne les facilite pas, qu'on les décourage, au contraire, par toute une série de « raisons ».
L'automobilisme – surtout sous la forme autobus – aurait dû depuis longtemps permettre des communications entre les communes rurales qui, en majorité, n'ont pas de gares. On a tout fait pour faire échec à cette commodité, qui aurait réduit le trafic ferroviaire. Et si maintenant des lignes d'autobus s'établissent avec plus de fréquence, c'est que, par un accord, leur exploitation a été livrée aux compagnies de chemins de fer, qui complètent ainsi leur monopole de la voie ferrée par le monopole des transports en commun sur route.
Les concessions minières sont également une autre sorte de monopole. Par loi ou décret, on a conféré à une société ou à une individualité le droit exclusif d'extraire la houille ou le minerai sur tel territoire déterminé. Toute l'exploitation minière ayant ainsi été répartie entre quelques compagnies, il en 'résulte que la consommation se trouve livrée aux appétits des concessionnaires de ces compagnies, lesquels réalisent de ce chef des profits scandaleux. On cite telle compagnie de mines, dont les actions, émises à mille francs, il y a 50 ou 75 ans, se négocient couramment à des centaines de milliers de francs – après avoir été totalement remboursées aux actionnaires.
C'est surtout dans les colonies que le régime des concessions et monopoles privés s'épanouit sans mesure. Sur d'immenses superficies, le monopole de la culture est attribué à certaines sociétés. Également le monopole du commerce, des ports, etc., etc. On est allé jusqu'à établir l'esclavage (dénommé travail forcé) au profit des compagnies à monopole, en leur accordant le droit de réquisitionner la main-d'œuvre, de la faire travailler et de la payer suivant le régime du bon plaisir des administrateurs.
À côté de ces monopoles officiellement reconnus et légalisés, il y a les monopoles de fait, organisés par les trusts (voir ce mot), cartels ou consortiums capitalistes.
Quelques gros magnats d'une industrie, ou quelques financiers, réalisent une entente pour mettre la main sur toute cette industrie. Soit en absorbant les concurrents par libre accord ou en achetant leurs actions, soit en les tuant par la concurrence et le « dumping », ils parviennent, en fait, à devenir (nationalement ou internationalement) les maîtres de la dite industrie, pour la fabrication, les échanges et la vente. Dès le moment où ils ont ainsi réalisé un véritable monopole de fait, où la consommation doit obligatoirement passer sous leurs fourches caudines, ils se conduisent comme les dirigeants des sociétés à monopole légal. Les consommateurs, ne pouvant plus se défendre, sont rançonnés sans merci ; et les monopolistes, raréfiant à volonté les produits du marché, en fixent les prix à leur convenance, et réalisent, de ce fait, de formidables profits.
Sous quelque forme qu'il se présente, le monopole n'est qu'une entreprise de spéculation, un pacte de famine, une escroquerie. Le monopole n'a qu'un objectif : mettre en coupe réglée la consommation, tondre le consommateur.
Les économistes qui défendent la société bourgeoise prétendent que l'équilibre économique s'y établit tout naturellement par le jeu du marché libre, de la concurrence. Il peut y avoir, disent-ils, des périodes troublées où la concurrence ne joue plus, mais cela ne peut être que provisoire, temporaire. La loi de l'offre et de la demande rétablit automatiquement un équilibre normal des prix. Une marchandise vendue chère attire les producteurs qui se dépêchent d'en fabriquer, et cette affluence de la production fait baisser les prix.
Tout cela, c'est de la théorie bourgeoise, mais la réalité est toute autre. On peut affirmer, sans crainte de démenti, que la libre concurrence n'existe pas dans la majorité des cas. Les monopoles des États, les monopoles des services d'intérêt public, les monopoles de fait créés dans les industries essentielles, les monopoles établis par des mesures douanières, ont, dans la pratique, à peu près supprimé la concurrence. La consommation est à la merci des industries et des trafics privilégiés, des compagnies concessionnaires.
Cette théorie de l'équilibre par la concurrence est une pure hypocrisie. Si l'on recherchait l'origine de toutes les grandes fortunes, on trouverait, neuf fois sur dix, à la source, un monopole quelconque, officiel ou non.
En fait, grâce à la pratique du monopole, les États d'une part, les organismes capitalistes d'autre part, ont pratiqué l'accaparement des produits et permis ainsi la réalisation de profits plus qu'abusifs, au détriment de la grande masse du public.
Il ne peut en être autrement dans une société basée sur le principe de l'autorité. Les maîtres s'entendent pour spolier les esclaves. L'expropriation des compagnies à monopole et la remise de leurs biens aux libres associations des usagers et du personnel, ne sera qu'une mesure de stricte justice une restitution d'un bien malhonnêtement acquis.
Ce
n'est, en effet, logiquement, ni à l'État ni aux pouvoirs publics,
ni aux groupements capitalistes, qu'il appartient de diriger les
services publics et les indus tries, mais aux consommateurs
intéressés, aux usagers organisés pour tirer de ces services la
plus grande utilité, le plus de bienfaits possibles et aux
meilleures conditions.
– Georges BASTIEN.
MONOPOLE
On a vu plus haut que le « monopole » est le privilège
exclusif de fabriquer ou de vendre certaines utilités, d'exploiter
certains services, d'occuper certaines charges publiques. Il y a
ainsi des monopoles légaux et des monopoles de fait.
Il y a monopole légal lorsque l'État se réserve, par des lois, des décrets, des ordonnances, l'échange, l'émission, la fabrication, la vente de certaines productions – frappe de la monnaie, fabrication de la poudre, émission de billets de banque ; exploitation des postes, téléphones ; des moyens de transport et de charroi, du gaz, de l'électricité (on dit alors que ces monopoles sont exercés dans un but d'ordre et de sécurité publique) – tabac, allumettes, alcool, etc. (on dit alors que c'est dans un but fiscal) – réserve à des inventeurs, des industriels, des commerçants, des producteurs intellectuels d'un monopole temporaire leur garantissant l'exploitation exclusive de leurs découvertes ou initiatives productrices (on dit alors que c'est dans un but d'encouragement à la science, à la production intellectuelle, à l'industrie, etc.).
Les monopoles de fait sont ceux qui suppriment ou limitent la concurrence professionnelle, commerciale ou industrielle en favorisant un individu ou une catégorie au détriment d'autres individus ou catégories (agents de change, médecins, pharmaciens, notaires, avoués, tenanciers de maisons de tolérance, etc.)
La lutte contre les monopoles tient une trop grande place dans le mouvement individualiste anarchiste rattaché à l'école Warren-Tucker pour que nous n'examinions pas les raisons de cette attitude et les conclusions qu'ils en tirent. Cette école – qui se réclame également de Proudhon – dénonce quatre grands monopoles :
1° Le monopole monétaire, c'est-à-dire la confiscation par l'État – à son profit – de l'émission des billets de banque et de la frappe de la monnaie. Du fait de ce monopole, les détenteurs de monnaie perçoivent un intérêt pour son usage journalier, si bien qu'un très grande nombre de personnes sont empêchées de produire ou de faire du commerce pour leur compte à cause des taux élevés qu'il leur faut payer pour obtenir du crédit. Journellement, des millions et des millions de consommateurs paient des milliards de dollars, marks, lires, francs, pesos, pesetas, etc., etc., à titre d'intérêt supplémentaire sur les produits qu'ils se procurent.
2° Le monopole foncier, c'est-à-dire la faculté légale que possède le propriétaire de sol de laisser ses terrains improductifs ou de ne pas les occuper lui-même. Le résultat de ce monopole, c'est le loyer, la rente de la terre, qui affecte tout le monde.
3° Le monopole des douanes, qui maintient à des prix élevés les utilités fabriquées, confectionnées, façonnées ou finies à l'intérieur, d'où perte pour le consommateur, qui ne peut bénéficier de la concurrence extérieure.
4° Le monopole des brevets, marques de fabrique, droits d'auteur, etc., qui empêche ou limite la concurrence et l'initiative en matière d'inventions, de spécialités industrielles, etc...
Cette école ne dit pas que la disparition de ces quatre monopoles abolirait absolument l'inégalité, mais elle produirait l'abondance et, de ce fait, l'inégalité tendrait toujours plus à disparaître.
Clarence L. Swartz, l'un des disciples immédiats de Tucker, a cherché à étayer cette thèse, dans What is mutualism ? en se basant sur les statistiques officielles relatives à la richesse et au revenu aux États-Unis, statistiques datées 1926. Voici, d'après elles, pour la période quinquennale 1918-1923, la répartition moyenne des revenus totaux des États-Unis :
Gages et salaires 50 %
Bénéfices commerciaux et industriels 20 %
Profits du capital, vente de terrains, garanties et nantissements, ventes d'actif divers, etc. 4 %
Loyers, redevances, intérêts et dividendes 26 %
Les 20 % attribués aux bénéfices commerciaux et industriels se divisent naturellement en deux sections :
La première comprend les bénéfices provenant de l'initiative et de l'habileté dans la gestion des affaires ou entreprises de caractère commercial ou industriel, c'est ce que C.-L. Swartz appelle Profit of Enterprise. Il pense que sur ces 20 %, il lui revient 6 %.
La seconde section comprend les bénéfices provenant des droits de douane, des exemptions de taxe, des privilèges spéciaux. 1° Prenons les droits de douane : en examinant les divers tarifs de douane en vigueur aux États-Unis depuis 50 ans, on s'aperçoit qu'ils ont eu pour effet de faire hausser d'un tiers le prix général des objets de consommation ; on peut sans exagérer évaluer au tiers de cette surcharge ou 11 % le bénéfice personnel des fabricants, manufacturiers, intermédiaires ; 2° Des documents officiels montrent que 1/8 à 1/10 des taux payés pour les utilités publiques le sont à titre de franchises, d'exonérations, de dégrèvements, de privilèges, de primes diverses. La même chose peut se dire des frais de transport ; 3° Il y a enfin les bénéfices résultant d'exemption et de privilèges légaux concédés aux industries de l'agriculture, du bâtiment, des mines. Tout cela, C.-L. Swartz l'appelle Profit of Privilege.
En estimant à 10 % le bénéfice des opérations effectuées sur la fabrication, le négoce, les transports et les utilités publiques privilégiées, c'est rester au-dessous de la vérité. En 1922, le revenu brut de ce groupe s'élevait à 90 milliards de dollars, dont le 10 % est 9 milliards de dollars, soit, du revenu national total : 14 %.
Rétablissons ainsi le tableau ci-dessus :
Revenu national des États-Unis (moyenne 1918-1923) : 64 milliards de dollars.
Répartition : % Milliards de
Gages et salaires. 50 % 32
Bénéfices initiative ou entreprise particulière. 6% 3,8
Bénéfice du Privilège. 14 % 9
Profit du capital, ventes de terrains, garanties et nantissements, ventes
d'actifs divers. 4% 2,6
Loyers, redevances, intérêts et dividendes. 26 % 16,6
――― ――
Soit 100 % 64,0
Revenu de l'effort et du travail. 56 % 35,8
Revenu du privilège. 44 % 28,2
――― ――
100 % 64,0
Mais ce n'est pas tout, les dépenses gouvernementales, aux États-Unis, s'élèvent à 11 milliards de dollars, soit 8 à 10 % du revenu national annuel. Comme la plus grande partie des impôts est finalement payée par les salariés en tant que consommateurs, il est très modéré d'en déduire que 10 % de ce qui est attribué à l'effort et au travail lui est enlevé pour subvenir à l'improductive activité gouvernementale. Il faut donc ramener à 46 % la part du revenu de l'effort et du travail.
Il
ressort de tout cela que 50 % au moins du revenu total annuel des
États-Unis est versé ou extorqué à titre de tribut ou de taxe au
profit du monopole ou pour l'entretien de l'improductif appareil
gouvernemental ; de sorte que si les femmes et les hommes employés,
aux États-Unis, à un effort productif, recevaient le salaire
intégral de leur travail, ils toucheraient le double de ce qu'ils
reçoivent actuellement. Il est à présumer qu'il en est à peu près
de même dans les autres pays.
– E. ARMAND.
À CONSULTER. – A. Fourgeaud : La rationalisation. – Liefmann : Cartels et trusts. – G. de Nouvion : Le Monopole des assurances. – Marchis : Le monopole de l'alcool. – etc.