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NÉGOCE n. m. (du latin : negotium, trafic, commerce)

Le mot négoce se dit dune opération de commerce, de trafic, d'une entremise pour la conclusion d'une affaire, d'un marché, etc. Se dit aussi de certaines combinaisons auxquelles il est dangereux de se livrer, Dans un sens péjoratif dit : l'on ne sait quel négoce font ces gens-là. L'usure est un négoce infâme, comme la contrebande est un négoce périlleux. Le mot négoce s'emploie surtout pour le gros commerce et comporte des marchés. Le négoce s'étend aux affaires de banque, de marchandises, etc ... Le commerce et le trafic se bornent, généralement, aux affaires qui n'ont trait qu'aux marchandises. Le commerce se fat par la vente et l'achat. Le trafic se rapporte à l'échange et le négoce à la spéculation. Ces trois termes sont parfois usités indifféremment. Le mot négoce est usité dans diverse, combinaisons. On dit : bien faire le négoce ; il y a le grand négoce là où se fait un commerce important ; un banquier fait d'énormes bénéfices dans ses négoces. En parlant d'une province, d'une nation, on ne dit pas négoce, mais commerce. Partout où il y a des hommes en contact, partout où il y a société, il se fait quelque trafic, quelque négoce. Le simple rapport des membres d' u n e même tribu, et même de deux familles fait naître le négoce, c'est-à-dire donne lieu à des opérations d'échange : soit de services, soit d'objets et produits. Dans nos sociétés civilisées et policées, il s'en faut cependant que le simple contact des hommes entre eux assure une égale liberté à chacun pour faire du négoce, étant donné la domination du capital qui fixe les conditions du travail. Inévitablement, il ne saurait être question de liberté et d'égalité là où le travail subit l'emprise du capital, et l'entreprise du commerce, du négoce, ne peut être tentée que par les détenteurs de capitaux. La libération du travail donnera, seule à tout le monde, à tout travailleur qui en manifestera le désir, la liberté du commerce et une égalité relative dans les rapports des hommes entre eux. La Souveraineté du Travail, seule, donnera à tous la liberté de consommer, puisque chacun pourra produire en vue de ses besoins. Quand tout travailleur, c'est-à-dire quand chaque individu se trouvera placé, socialement, dans des conditions de liberté et d'égalité équivalentes pour la production des richesses, la consommation en sera aussi étendue que possible et le négoce de notre époque n'existera pas. Mais quand le travailleur principal, le prolétaire, ne dispose pas des moyens nécessaires pour assurer sa liberté et son indépendance économique, la liberté du négoce ne l'intéresse pas ou peu, car il sait, d'avance, que l'organisation sociale fait de lui une victime. Les maîtres de l'heure, et non les prolétaires, peuvent seuls échanger librement, faire du négoce, puisque, seuls, sous un régime plus ou moins restrictif, ils accaparent et accumulent les produits et richesses diverses.

Plus l'échange est libre, plus il y a pour les capitalistes, pour les maîtres exploiteurs, des facilités pour s'enrichir et plus les prolétaires s'appauvrissent par l'apport aux développements de leur intelligence.

Sous l'esclavage du travail, c'est-à-dire sous l'organisation sociale actuelle, le négoce, rendu libre entre capitalistes seulement, aboutit à la création de cartels, de trusts, d'omnium... et constitue un pas décisif vers l'esclavage du travail aussi bien que vers le despotisme de la finance.

Le moyen essentiel que puisse mettre en œuvre l'Humanité pour moraliser le commerce et sortir de ce gâchis déplorable et malfaisant, pour rendre la société vivable dans une harmonie relative, consiste, au point de vue économique, à établir la souveraineté du travail.


- Elie SOUBEYRAN