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OXYGENE n. m. (de oxus, piquant, et genos, commencement)

L'oxygène est un gaz incolore, inodore, sans saveur, légèrement soluble dans l'eau qui en absorbe environ 1/25 de son volume. Très abondant dans la nature, il entre dans la composition des anhydrides, des oxacides et des oxydes. C'est un des éléments de l'air et de l'eau, des matières végétales et animales, enfin de presque tous les composés connus. Combiné avec l'hydrogène, il donne naissance à deux corps composés dont le plus important est l'eau. L'eau est composée d'une partie d'oxygène pour deux parties d'hydrogène, en volume et de 89 parties d'oxygène et de 11 parties d'hydrogène en poids. L'oxygène compose pour 1/5 l'air atmosphérique ; sa densité est de 1,1056 par rapport à l'air. Il est absorbé à froid et mieux à chaud par certains métaux et certains oxydes métalliques : l'argent fondu en absorbe notamment vingt deux fois son volume sans combinaison. Il forme, directement ou indirectement, des composés avec tous les corps simples, sauf le fluor, l'or et le platine.

La principale caractéristique de l'oxygène est d'être éminemment propre à faire brûler les autres corps. On dit, en chimie, qu'un corps est en combustion ou qu'il brûle, quand il se combine avec l'oxygène.

Parfois l'oxydation se produit avec un grand dégagement de chaleur, elle se propage dans toute la masse après avoir été amorcée en un point ; la réaction qui se produit rapidement dégage en un temps très court une grande quantité de lumière et de chaleur qui porte les produits de la combustion à une haute température (combustions vives). Plongeons, par exemple, dans un flacon rempli d'oxygène, une allumette qui ne flambe plus, mais qui présente encore quelques points rouges et nous la verrons se rallumer instantanément et brûler avec une grande rapidité. Il en est de même des autres corps et surtout du soufre, du carbone et du phosphore qui brûlent dans ce gaz avec une grande activité en jetant un vif éclat et donnant lieu, dans ce cas, à la production d'anhydride sulfureux, carbonique et phosphorique. De même les métaux préalablement chauffés, brûlent quand ils sont plongés dans l'oxygène.

Chaque fois que l'oxygène se combine avec un autre corps, il y a production de lumière et de chaleur. Cette chaleur et cette lumière ne sont pas comme dans l'exemple ci-dessus cité, toujours visibles, car la combustion est loin d'être dans tous les cas aussi rapide que nous venons de le voir : un clou ou un quelconque morceau de fer, abandonné à l'air humide, s'unit à l'oxygène et se rouille lentement. De cette façon, la quantité de chaleur et de lumière qui se produit se répartit en un nombre infini d'instants et le phénomène reste inappréciable à nos organes.

La putréfaction de certains corps organiques n'est due qu'à une très lente combinaison avec l'oxygène : c'est ainsi que le fumier en se décomposant, trouve assez de chaleur pour vaporiser l'eau et former des vapeurs. C'est encore l'oxygène de l'air qui fait naître ces flammes vagabondes qui errent la nuit à la surface des marais et des tombes de cimetières : feux follets, terreur de nos aïeux superstitieux.

La respiration est une combustion lente. L'air pénétrant dans l'appareil respiratoire, qui diffère avec les êtres, abandonne l'oxygène qui passe avec le sang dans l'organisme, brûle lentement nos tissus et se transforme en acide carbonique et en eau qui sont rejetés. (Voir au mot : Respiration.) Le manque d'oxygène entraîne une asphyxie rapide et l'excès en est redoutable parce qu'il brûle et transforme alors tissus et organes.

Depuis des millions d'années, des milliers et des milliers d'êtres absorbent l'oxygène de l'air, le transforment, et malgré tout n'en viennent pas à bout. Ce fait trouve son explication comme suit : la nature a chargé les végétaux de fabriquer l'oxygène indispensable. Comme nous, ceux-ci respirent l'air atmosphérique, mais ils jouissent d'une curieuse propriété : sous l'action de la lumière, la partie verte de leur feuille, appelée chlorophylle décompose l'acide carbonique issu de la respiration des êtres en oxygène qu'elle rejette pour s'assimiler le carbone qu'elle combine avec certaines substances nutritives pour constituer le tissu des plantes. Certains savants chimistes estiment que l'ensemble des végétaux répandu sur le globe terrestre donne environ 100.000 tonnes d'oxygène par an, ce qui suffirait à établir l'équilibre entre la consommation et la production.

L'oxygène peut se combiner avec lui-même et donner naissance à un composé où il est plus condensé et qui prend le nom d'ozone. C'est alors un gaz coloré en bleu, à odeur caractéristique (il sent le homard frais), provoquant des crachements de sang, qui attaque et blanchit presque toutes les substances, oxydant et brûlant les matières organiques, attaquant énergiquement à froid le fer, le zinc, le mercure et même l'argent. Il est alors 13 fois plus soluble que l'oxygène et se liquéfie à – 125°. Il se décompose totalement à 250 degrés. On l'utilise comme désinfectant, ainsi que pour la fabrication des huiles siccatives. L'air du matin, dans les campagnes, contient des traces d'ozone auxquelles on attribue une action vivifiante pour tous les êtres.

L'oxygène a été découvert simultanément et d'une façon tout à fait indépendante, par deux chimistes : l'Anglais Joseph Priestley et le Suédois Ch.-W. Scheele. Priestley découvrit l'oxygène en 1771. Ce savant l'avait obtenu d'abord par la calcination du nitre. Il l'obtint ensuite en calcinant l'oxyde rouge du mercure. Il découvrit aussi les propriétés comburantes de l'oxygène, mais c'est Lavoisier qui, le premier, de 1772 à 1774, a extrait l'oxygène de l'air. Les travaux remarquables qu'il fit à cette occasion, ont servi de base à la chimie moderne. Scheele ne connaissait rien des recherches de Priestley quand il découvrit également l'oxygène, qu'il fabriqua avec des oxydes de métaux du genre le plus différent, en particulier avec de l'oxyde de mercure et du manganèse. L'oxygène a été liquéfié par Cailletet et Raoul Pictet en 1877, à la température de - 138 degrés et sous la pression de 22 atmosphère et demi. L'oxygène liquide qui est bleuâtre, bout à - 181 degrés.

C'est à partir de la découverte de l'oxygène, le plus important de tous les corps et la substance la plus répandue, celle qui existe en plus grande quantité sur le globe, que la chimie abandonna l'ornière où elle se débattait : celle où l'avait plongée la théorie du phlogistique imposée par Sthal, au début du XVIIIème siècle, pour marcher à grandes enjambées vers les merveilleuses découvertes des temps modernes.

Aussitôt que les premiers procédés d'analyse furent découverts, ils ne tardèrent pas à se perfectionner et à s'enrichir et ils nous ont donné la magnifique floraison qui caractérise les merveilles de la chimie du XXème siècle. 

- Ch. ALEXANDRE.