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POLES n. pl. (du grec polein : tourner)

La sphère céleste semble tourner tout entière, il est en ouest, au­ tour d'un point du ciel voisin de l'étoile Alpha de la Petite Ourse (étoile polaire). Si nous faisons partir dans la direction du fil à plomb, une ligne imaginaire qui traverse le centre de la terre et qui va aboutir de l’autre côté de la sphère, nous obtiendrons l'axe de la terre, c'est-à-dire la ligne autour de laquelle elle semble tourner. Chacun des points où l'extrémité de l'axe terrestre perce le globe est un pôle. Celui tourné du côté de l'étoile polaire est le pôle nord, boréal ou arctique. Le pôle opposé est le pôle sud, austral ou antarctique. S'appellent zones glaciales ou régions polaires, les pays ou océans compris autour des pôles dans l'intérieur des cercles polaires, lesquels sont respectivement situé à 66° 33' de l'équateur. Elles occupent les 8/10e de la surface totale du sphéroïde terrestre.

Les rayons solaires ne font que glisser à la surface de ces régions désolées et froides. La sphéricité du globe amène les rayons du soleil, de verticaux qu'ils sont à l'équateur à devenir de plus en plus obliques vers les pôles. Et comme la température d'un lieu dépend de l'échauffement de ce lieu par le soleil, elle décroît donc de l'équateur aux pôles ; d'autre part comme le soleil échauffe la terre, non pas par la distance à laquelle les divers points du globe se trouvent par rapport à l'astre du jour, mais proportionnellement à la perpendicularité des rayons, on conçoit que la vie végétale et animale, à plus forte raison la vie humaine, n'existe pour ainsi dire pas dans les régions polaires. Au nord, seules les côtes les plus méridionales et surtout celles de l'ouest dans la direction du détroit de Davis et de la mer de Baffin, sont habitées par une population de nomades atteignant à peine 10.000 habitants. Au cours des longs hivers, la température s'abaisse parfois jusqu’à 50 à 60 degrés sous zéro et elle ne s'élève guère pendant les courts étés à plus de 6 à 7 degrés au dessus de zéro. De plus, l'inclinaison de la terre sur son axe, produit une différence dans la durée du jour et de la nuit, suivant la latitude du pays que l'on considère. Aux cercles polaires le soleil ne se couche pas pendant le jour du solstice d'été et ne se montre pas le jour du solstice d'hiver. Depuis ce cercle jusqu'au pôle, le soleil ne se lève pas ou ne se couche pas pendant un nombre de jours qui va toujours en augmentant jusqu'au pôle même où l'on trouve six mois de jours et six mois de nuit.

On conçoit aisément que, dans ces régions qui connaissent un été très court (3 mois) et où le sol est presque toujours gelé, où l’océan est recouvert d'une banquise épaisse, la faune et la flore soient très restreintes. La faune terrestre est à peu près nulle dans les régions polaires australes, elle est plus riche dans les régions boréales. Nous y trouvons des carnassiers de petite taille : blaireaux, renards, martes ; des rongeurs : lièvres blancs, lemmings et des carnassiers de grande taille : ours blancs ; des ruminants : bœufs musqués, rennes, élans, etc. La faune aérienne et marine est assez abondante dans les deux hémisphères : palmipèdes migrateurs, échassiers, passereaux, pingouins, guillemots, goélands, plongeons, mallettes, cormorans, fous, eidus pour l'hémisphère nord ; au sud, notons : manchots, pétrels, albatros, puffins, etc. Dans les eaux vivent les cétacés et les pinnipèdes, les phoques et les morses dans les régions arctiques et, dans les régions australes, les otaries. La flore comprend dans les deux hémisphères des mousses et des lichens et dans celui du nord existent quelques espèces naines de saules et de bouleaux qui profitent des trois mois d'été pour achever en une ou deux saisons, leur complet développement. Au-delà du 70° parallèle, la faune et la flore disparaissent pour ainsi dire. Les morses, les phoques et les pingouins sont les derniers animaux qui persistent dans les solitudes, la terre s'achève au Nord et au Sud dans le froid et la nuit...

Les régions polaires n'ont pas toujours présenté le caractère qu'elles nous montrent aujourd'hui ; elles n'ont pas connu de tout temps le climat rigoureux qui les caractérise actuellement. A l'âge tertiaire, à la période néogène, le climat des pôles était voisin de celui des régions méditerranéennes actuelles. La faune et. la flore y étaient alors considérables. Notons aussi qu'aux époques géologiques antérieures, la chaleur reçue aux pôles était égale à celle que recevait l'équateur et que les formes de vie animales et végétales étaient, à peu de choses près, semblables sur toute l'étendue du globe.

On s'imagine aisément que les régions polaires n'ont que peu tenté les explorateurs. Et, de fait, les explorations entreprises dans ces pays n'ont été inspirées que par une pensée scientifique et économique : la recherche des pôles, l'espoir de trouver une route maritime plus directe pour passer de l'Europe en Asie et en Amérique. Nous devons diviser les explorations polaires en quatre groupes : 1° celles tentées pour rechercher le passage du NO ; 2° celles tentées pour découvrir le passage du NE ; 3° les expéditions tentées pour atteindre le pôle nord, et 4° les expéditions antarctiques.

1° Passage du Nord-Ouest, qui a pour but de reconnaître la route maritime la plus directe pour passer du Nord de l'Amérique septentrionale au détroit de Behring. En 1497, Sébastien Cabot aperçoit le détroit de Davis. Un peu plus tard, les frères Cortéréal aperçoivent le détroit d'Hudson. Notons les ouvrages de Martin Irobisher qui découvre la côte méridionale de la terre de Baffin. Ensuite, John Davis entreprit de 1585 à 1587, trois voyages au cours desquels il explore le détroit qui porte son nom et la terre de Baffin jusqu'au 72° latitude nord. En 1610, Hudson étudie la baie qui porte son nom. Citons les expéditions de Button et Ingram (1612), de Luke Fox et de Th. James (1631). Aucune de ces expéditions, sauf celle de Baffin et Byllot qui atteignirent le 78° de latitude nord et découvrirent, sans en reconnaître le véritable caractère, le détroit de Lancastre ne furent fructueuses. Il était réservé aux explorateurs du XIXe siècle de coordonner les découvertes de leurs devanciers et de trouver le passage tant cherché. En 1819, Edward Pany s'avança jusqu'à la terre de Melville et parvint à la terre de Banks. En 1847, après un double hivernage, Franklin mourut à la terre du roi Guillaume. Pendant ce temps, James Clark Ross et Parry reconnurent le groupe d'archipels existant à l'ouest du bassin de Melville. En 1858, Mac Clure découvrit le passage en entier, passage constitué par un ensemble de canaux conduisant d'un océan à l'autre, mais dont la navigabilité est rendue impossible par les obstacles climatériques.

2° Passage du Nord-Est, qui, à travers l'ensemble de détroits existants entre le seuil de Behring et la Nouvelle Zemble, fait communiquer, le long du littoral sibérien, le Pacifique septentrional et l'Atlantique nord. Notons d'abord, en 1554, la tentative de Willougby qui atteignit la Nouvelle Zemble et vint mourir, au retour, à l'île Nokonief, sur la côte de Laponie. Citons le voyage de Bourrough qui atteignit l'extrémité méridionale de la Nouvelle Zemble et celui de A. Pet et Ch. Jackmin en 1580, jusqu'à la mer de Kara. En 1596, Willem Barentz découvrit le Spitzberg et atteignit la côte occidentale de la Nouvelle Zemble où il mourut après un dur hivernage. Hudson, en 1607, parvint jusqu'au 80° de latitude nord. A retenir ensuite un certain nombre de petites expéditions faites au cours des 66 années suivantes, par des Danois, des Hollandais, des Anglais. Mais ce ne fut qu'au XIXe siècle que se firent les expéditions décisives. L'expédition autrichienne de Weyprecht et Payer dé­ couvrit, en 187l, la terre François-Joseph. L'archipel de la Nouvelle Sibérie, l'île Wrangel, à l'est du cap Tchéliouskine, furent reconnus par divers explorateurs russes. En 1878-79, le Suédois Nordenskjôld coordonna les découvertes antérieures en réussissant la traversée du passage du N.-E. Comme celui du N.-O., ce passage est inutilisable à cause des glaces qui l'encombrent ou l’interceptent continuellement.

3° Découverte du pôle nord. - Pendant que certains cherchaient la solution aux problèmes des passages du N.-O. et du N.-E., de hardis explorateurs s'avancèrent de plus en plus loin dans les régions polaires et tentèrent d'approcher le pôle nord. En 1861, Hayes atteignit, dans la direction du détroit de Smith, le 81 ° 35' de latitude ; Hall le 82° 16' ; en 1876, Markham parvint jusqu'au 83° 20', tandis que des membres de l'expédition Greely s'avançaient au nord du Groenland jusqu'au 83°. En 1898, Peary dépassa ce dernier point de 26'. Notons l'expédition de Nansen vers le Groenland en 1888. En 1895, le même atteignit au nord de la terre François-Joseph, la latitude de 86° 4' et, en 1900, l'Italien Cogni, membre de l'expédition du duc des Abruzzes, s'avança dans les mêmes parages jusqu'à la latitude de 86° 34'. Signalons l’expédition d'Andrée en ballon, en 1897, de Siscedrupt (1901), de Peary qui découvrit le pôle nord le 6 avril 1909. Plus près de nous, se situe l'expédition du général italien Nobile en zeppelin, et la tentative faite actuellement pour atteindre le pôle en sous-marin.

4° Régions antarctiques. - Les régions polaires antarctiques n'ont que peu sollicité les explorateurs. Seules des considérations d'ordre scientifique et l'ambition de savoir si cette immense calotte de glace recouvre un continent autonome ou un archipel, conduisirent les audacieux vers les régions australes qui s'avèrent d'une pénétration difficile et qui sont plus éloignées que les régions arctiques de tout pays civilisé.

Théodore de Gheritk et Kerguelin découvrirent l'îlot de Kerguelin. Cook découvrit les Sandwich du Sud. En 1819, Smith reconnaît le groupe important des Shetland. En 1823, le baleinier Wedel s'approche du 80° parallèle. En 1839, Dumont d'Urville découvre la terre Louis­ Philippe et Bellingshausen l'archipel Pierre Ier (1821). De Wilkes et James Clark Ross découvrent, en 1844, les volcans Erebus et Tenon, sous le 78° latitude sud, et la terre de Victoria. En 1892, Scott parvint jusqu'au 82° 17' de latitude sud. De Gerlache pousse, en 1897, jusqu'au 71° latitude et découvre de nombreuses terres australes.

Shackleton atteignit le 88°23 de latitude sud en 1909 et le 16 décembre 1911, Amundsen toucha le pôle sud. Récemment, l'expédition américaine Byrd séjourna ­- voyage d'études - et étudia les régions australes.

- Ch. ALEXANDRE.

BIBLIOGRAPHIE. - La surface terrestre (Ch. Weule) (L'Univers et l'Humanité, tome IV).