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RACE (RACES) n. f. (du latin ratio ; puis l’italien razza)



Le mot race paraît tirer son étymologie de l’italien razza. En français, il représente la lignée d’une même famille, d’un peuple ou d’une région plus ou moins étendue. Pour faciliter les recherches d’ordre physique, on applique le mot race aux animaux aussi bien qu’aux hommes. Tout particulièrement, nous nous intéresserons au mot race relativement aux diverses variétés de l’espèce humaine, telles que races blanche, jaune, rouge et noire, sans oublier qu’il existe une infinité de races de couleurs intermédiaires. Au figuré, l’on parle quelquefois de race quand il s’agit de désigner certaines catégories d’hommes ayant une profession ou une inclination commune. Ces définitions ont pour but de simplifier le sens à accorder au mot race dans les divers emplois que l’on en fait. Le mot race nous intéresse sérieusement au point de vue socialiste ; et c’est la raison qui nous incite à entrer dans un développement de notre pensée sur ce sujet. S’il ne s’agit, par le mot race, que d’exprimer le caractère distinctif d’un peuple, caractère dérivant de ses dispositions organiques et dû au climat où ce peuple vit, aussi bien qu’à des habitudes que les siècles ont consacrées et qui le portent à concevoir les choses et à raisonner sur elles dans un sens particulier, le terme race a une valeur admissible. En présentant la valeur du mot race d’après ce qui précède, nous verrons qu’il y a des peuples et des races plus ou moins lents ou vifs d’allure, d’autres graves ou badins, constants ou légers, économes ou prodigues, guerriers ou pacifiques ; d’autres conquérants ; d’autres pacificateurs, organisateurs ; enfin, d’autres chasseurs, bergers, nomades, cultivateurs, industriels, etc. Le même raisonnement nous montrera qu’il y a des races d’hommes de toute nuance, à cheveux plus ou moins foncés, plats, crépus ou frisés, et des parties de l’organisme plus ou moins améliorées dans le sens de la civilisation. Si, quittant ces considérations qui se rapportent davantage à l’ordre social, nous voulons donner au mot race la signification de peuple essentiellement différent des autres peuples physiquement, organiquement destiné à être trompeur ou trompé, méchant ou bon, maître ou esclave, nous verrons que ce mot n’offre à l’esprit qu’une absurdité.



Nous ne rechercherons pas, ici, si l’homme a paru sur le globe par un seul couple ou par plusieurs à la fois et en différents lieux ; cela nous mènerait trop loin, et ce n’est pas nécessaire pour le bien-fondé de notre thèse. Nous ne voulons voir dans l’homme que l’être raisonnable qui se manifeste à son prochain par le sentiment qu’il a de son existence, qui préside à son intelligence et en permet la manifestation pour son usage exclusif. Il en est ainsi parce qu’il n’y a, pour l’homme, qu’un raisonnement, comme il n’y a qu’une raison pour l’orienter vers le progrès, le bien et la pratique de la justice vis-à-vis de tous et de chacun. Sans doute, selon les races, certains organismes diffèrent, mais cette circonstance et celles qui, du dehors, facilitent ou contrarient son action font que l’homme raisonne plus où moins facilement sur un certain nombre de questions. Ainsi, il peut conserver, plus ou moins longtemps, à travers les générations et les événements, l’impression et le souvenir des idées qu’il a acquises. L’empirisme, comme développement intellectuel, aboutit à ce résultat. S’il en était autrement, si l’homme caractérisé par les races n’était qu’une machine agencée par la nature, représentant l’unique matière combinée, fatalement, pour le mouvement particulier qui s’appelle vie et pour le fonctionnement spécial qu’on nomme raisonnement, tout serait déterminé, par avance, et l’action individuelle ne serait qu’un résultat mécanique inévitable, même non modifiable. C’est pour cette raison que la morale n’est pas une sottise seule profitable aux puissants, aux déterminés supérieurs. L’homme moral ne dépend plus de l’influence de sa race, que l’on pourrait prétendre son essence supérieure et différente de celle des autres races. En nous reportant toujours au mot race, et par suite à celui d’homme, nous verrons qu’il ne peut y avoir de conscience, au sens exact du mot, sans idées, point d’idées sans travail intellectuel de comparaison et de déduction rationnelle. En définitive, pour les hommes, rien n’existerait, socialement parlant, sans le raisonnement, comme c’est le cas pour les autres êtres. Or, l’expérience qu’on aime à mettre à contribution dans les milieux avancés nous prouve que l’homme ne naît pas avec des raisonnements tout faits ni avec le mécanisme d’où jailliront des raisonnements déterminés. Ainsi, l’expérience, le raisonnement et l’intelligence s’accordent pour nous prouver qu’on naît simplement avec son organisme et la faculté de sentir et de raisonner. Les races, et par voie de conséquence tous les hommes qui les composent, sont susceptibles de bien raisonner et de s’élever aux connaissances que l’harmonie sociale nécessite pour fonder une société rationnelle. 

— Élie SOUBEYRAN.



RACES

Les hommes appartiennent-ils à une ou à plusieurs espèces originelles ? On discute beaucoup sur ce sujet : pour les polygénistes, les hommes descendraient de plusieurs espèces apparues sur divers points du globe ; pour les monogénistes, au contraire, ils proviendraient tous d’un type unique. Couleur de la peau, aspect des cheveux, forme du crâne, des yeux, du nez permettent de distinguer aisément les grandes races humaines ; mais il a fallu de longues et pénibles recherches pour établir scientifiquement les principaux groupes et sous-groupes qu’elles comportent. L’antagonisme des races, dont parlent si souvent les écrivains patriotes, n’a d’autre raison d’être que la volonté des chefs et l’intérêt des marchands de canons. Parce qu’ils diffèrent par leurs aptitudes, leurs goûts et maintes particularités physiques, les hommes n’ont pas besoin de se quereller et de se battre. « Vigne et blé noir ne poussent pas dans les mêmes terres : un laboureur habile diversifie les cultures selon le sol et le climat. Mais c’est l’accord harmonieux des peuples, non la lutte de chacun contre tous, qui s’impose au degré d’évolution où nous sommes. » (L’Ère du Cœur.) Dans l’explication de l’histoire, certains penseurs attribuent une importance capitale à la question des races. Selon Taine, race, milieu, moment suffisent à rendre compte des œuvres d’art, de la littérature, de l’histoire. Gobineau, au XIXème siècle, a émis des idées sur les races qui furent plutôt mal accueillies en France, mais qui lui ont valu une réputation durable. Il croit à la supériorité des races nordiques et à la décadence des races latines. Très aristocrate, adversaire des théories démocratiques, ayant une haute idée des peuples germaniques, Gobineau, qui était diplomate de carrière, trouva de bonne heure des partisans en Allemagne. Chez nous, ses ouvrages obtinrent un succès d’estime dans un cercle très restreint. Durant la guerre de 1914-1918, on a parfois rappelé sa mémoire, mais en condamnant ses conceptions. Quelques penseurs continuent néanmoins d’avoir pour lui une estime profonde.