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RÉGÉNÉRATION n. f. du latin regeneratio



Reproduction d’un tissu, d’une partie qui a été détruite : la régénération des chairs ; la régénération du tissu osseux par le périoste. Au figuré, « réformation, renouvellement » : la régénération des mœurs ; la régénération d’un peuple. En termes de religion et en parlant du baptême, signifie « renaissance » : la régénération en Jésus-Christ.



En biologie, on appelle régénération la formation nouvelle d’une partie enlevée à un organisme. Elle se fait normalement, physiologiquement. Chez tous les insectes, à la suite de la mue des poils, des plumes, des écailles, ou des épithéliums ; c’est à peu près la seule que l’on constate chez les mammifères, les oiseaux, les reptiles, les poissons, les mollusques et les arthropodes aériens. Mais on peut observer chez les autres animaux une régénération anormale, accidentelle ou pathologique, dans laquelle les organes entiers ou même des portions d’individu peuvent se reformer après avoir été enlevés. Chez les batraciens urodèles, par exemple, la queue, les pattes, l’œil et les branchies régénèrent. Les crabes reforment leurs pattes, les vers leur queue, les étoiles de mer leurs bras. Cette faculté surprenante de reformer un organe enlevé ou détruit expliquerait, dans bien des cas, le phénomène d’auto amputation que l’on observe chez certains animaux.



Régénération de l’espèce humaine. — On entend par-là une méthode de sélection volontaire, raisonnée, comprenant deux parties : l’une négative, l’abstention procréatrice des tarés, des dégénérés, des déficients de toute nature par l’emploi des moyens anticonceptionnels, ou par la stérilisation, consentie ou imposée, selon les cas, par l’opération chirurgicale dite vasectomie (voir ce mot) ; l’autre par l’application des méthodes eugéniques, ou science de la bonne naissance.



Dans les sociétés modernes, la sélection naturelle qui consacre généralement la survivance des plus forts, des plus beaux et des mieux doués, est plutôt renversée. Par les guerres, les jeunes, les forts, les sains, ceux qui ont les plus grandes chances de devenir les meilleurs reproducteurs sont sacrifiés. Par le privilège de la richesse, les individus les plus propres à la procréation de beaux enfants sont presque toujours supplantés à l’avantage des vieux, des tarés, des dégénérés : il est plus facile à un homme âgé, usé, laid et même infirme, mais riche, de fonder une famille qu’à un homme jeune, beau, d’intelligence droite, mais pauvre. Il s’ensuit, alors, une sélection à rebours, une véritable dégénérescence de l’espèce.



Ligue de la régénération humaine. — Hist. Fondée en 1896 par Paul Robin, section française de la Ligue universelle de la régénération humaine, dont le secrétaire général était Eugène Humbert ; elle fut dissoute en 1908, son organe mensuel avait pour titre Régénération (voir au mot Malthusianisme).



Après la promulgation de la loi scélérate du 31 juillet 1920, qui punit de prison – jusqu’à trois années – et d’amende – jusqu’à trois mille francs – la propagande néo-malthusienne et la divulgation des procédés anticonceptionnels, les buts préconisés par Paul Robin ne pouvant plus, sans danger, être exposés ni poursuivis, Eugène Humbert reforma la Ligue de la régénération humaine en 1929, sous la présidence d’honneur de Victor Margueritte, mais avec les principes et les buts de la Ligue mondiale pour la réforme sexuelle sur une base scientifique. Il fonda ensuite La Grande Réforme pour servir de lien et de moniteur aux adhérents régénérateurs. Les principes et les buts de la Ligue mondiale pour la réforme sexuelle, fondée en 1928, sous la présidence d’honneur des célèbres sexologues Auguste Forel, Havelock Ellis et Magnus Hirschfeld, se rapprochent sensiblement de ceux de Paul Robin et des néo-malthusiens d’avant 1914 ; ils comportent trois points essentiels de la régénération humaine : le contrôle des naissances, l’application des méthodes de l’eugénique et la prévention de la prostitution et des maladies vénériennes.



Voici ses dix principes directeurs :



Égalité politique, économique et sexuelle des hommes et des femmes. – 2° Libération du mariage, et spécialement du divorce, des règles tyranniques de l’Église et de l’État. – 3° Contrôle de la conception, de telle sorte que la procréation soit consentie délibérément et avec un sens exact des responsabilités. – 4° Amélioration de la race par l’application des méthodes de l’eugénique et de la puériculture. – 5° Protection des filles mères et des enfants illégitimes. – 6° Conduite humaine et rationnelle envers les anormaux sexuels comme, par exemple, les homosexuels, hommes et femmes, les fétichistes, les exhibitionnistes, etc. – 7° Prévention de la prostitution et des maladies vénériennes. – 8° Incorporation des troubles dus à l’impulsion sexuelle dans la classe des phénomènes d’ordre pathologique, et non plus envisagés, ainsi qu’on l’a fait jusqu’à aujourd’hui, comme des crimes, des vices ou des péchés. – 9° Seuls peuvent être considérés comme criminels les actes sexuels qui transgressent la liberté ou portent atteinte aux droits d’une autre personne. Les relations sexuelles entre adultes responsables, consenties mutuellement, doivent être respectées comme étant des actes privés qui n’engagent que leurs personnes. – 10° Éducation sexuelle systématique dans le sens de la plus grande liberté, et dans le respect de soi et d’autrui.



Si l’on ajoute à ce programme l’éducation intégrale, le développement général des principes d’hygiène individuelle et sociale devant remplacer la médecine, la transformation de la société bourgeoise ou capitaliste en un milieu social qui assurerait à tous le bien-être, c’est-à-dire les possibilités pour tous les êtres humains de se développer sainement, intégralement, on voit que le titre pris par les réformateurs sexualistes de nos jours n’est point usurpé.



Jeanne et Eugène HUMBERT.