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TÉLÉPHONE n. m. du grec télé, loin et phoné, voix

C'est un appareil qui permet de transmettre la parole à distance. Le premier fut imaginé par Graham Bell, en 1876. Depuis cette époque, la téléphonie a fait d'im­menses progrès, et un nombre considérable de brevets furent pris à son sujet. Cependant, de nos jours encore, c'est toujours le même principe qui est appliqué.

Ce principe est simple. Un téléphone est constitué par un aimant permanent sur lequel est bobiné un fil et dont l'armature est formée par une membrane de fer doux. Si l'on dispose de deux appareils identiques, et si l'on relie par deux fils conducteurs les enroulements réali­sés autour des aimants, on obtiendra un circuit fermé électriquement. Tant que tout est au repos, le flux ma­gnétique est constant dans chacun des électro-aimants. Mais supposons que l'on déforme le circuit magnéti­que d'un des appareils par exemple en déplaçant son armature, cela provoquera la naissance d'un courant induit dans le circuit ; ce courant induit passant dans l'appareil, fera varier la force d'attraction exercée par l'aimant sur la membrane qui lui sert d'armature. On conçoit que, si la membrane est constituée par un métal convenable, si elle est encastrée, si la valeur de l'entre­fer est bien choisie, etc., la membrane prenne un mou­vement correspondant à celui qui est imprimé à l'autre extrémité de la ligne. Si, en particulier, le mouvement imprimé à l’appareil émetteur est provoqué par des vibrations de la voix, on conçoit que la membrane de l'appareil récepteur puisse reproduire les mêmes mou­vements et, par conséquent, le son qui a été produit devant la membrane de l'appareil émetteur.

Un ensemble téléphonique fonctionnant d'après ce système, serait plutôt une curiosité de laboratoire avec portée maxima de cent à deux cents mètres. Mais il résulte de ce que nous avons vu que le but à atteindre est simplement de provoquer dans le récepteur une va­riation de flux assez forte ; pour ce faire, on a trouvé un autre procédé. Il consiste à insérer le récepteur télé­phonique dans un circuit où il est en série avec une source de courant continu et une résistance variable. Les variations de cette résistance provoqueront des variations de flux magnétique dans l'électro-aimant. En pratique, on utilise comme résistance variable un micro­phone : c'est un organe généralement constitué par deux électrodes entre lesquelles est enfermé du charbon en grenaille. L'une de ces électrodes peut vibrer quand on parle devant elle, ce qui entraîne des variations de pression des grains de charbon les uns sur les autres et sur 1es électrodes et, par suite, des variations de résistance. L'expérience prouve que le courant ainsi modulé par les variations de résistance du microphone, en passant dans l'électro du récepteur, imprime à la membrane des mouvements qui reproduisent les sons émis.

Si l'on analyse le courant téléphonique au moyen de l'oscillographe enregistreur, on note une courbe ana­logue à celle d'un enregistrement phonographique. Une étude de ces courbes montre l'existence de plusieurs harmoniques. La transmission exacte de ces harmoni­ques ou du moins des plus importants, permet de repro­duire le timbre exact de la voix.

La portée des communications téléphoniques a été augmentée une première fois par l'emploi de transfor­mateurs, Ensuite, la lampe à trois électrodes, étudiée sommairement au mot Télégraphie sans fil, employée comme relai, augmenta encore dans des proportions plus grande, cette portée. Et, par l'emploi de plusieurs relais, on arrive à téléphoner de Paris à Londres, de Paris à Alger.

Un perfectionnement intéressant de la téléphonie dû en grande partie aux études entreprises en T. S. F., permet d'avoir plusieurs communications sur la même ligne. Une façon de résoudre ce problème est l'emploi de la haute fréquence. Sur un même circuit, on peut faire passer plusieurs courants à haute fréquence, à fréquence différente. Chacun de ces courants étant mo­dulé par la parole, un même circuit peut transmettre plusieurs conversations. Il suffit, à l'arrivée, de faire une sélection, comme en T. S. F. on arrive à sélection­ner des stations à longueurs d'ondes différentes. Ces installations sont peu encombrantes, et facilement amo­vibles et on peut, ainsi, envisager leur emploi lorsqu'il y a lieu, en un point quelconque, de parer à un afflux de trafic momentané, comme cela se produit au moment des foires ou de la saison, dans les stations balnéaires. D'autre part, le fait de l'emploi de fréquences élevées rend la captation de ces communications extrêmement difficile et l'emploi de ce système garantit, d'une façon à peu près absolue, le secret des communications.

Voyons maintenant comment on coordonne un ensem­ble de lignes, pour former un réseau. Le problème ne présente aucune difficulté spéciale lorsqu'il y a peu de lignes; on imagine alors aisément les solutions à envi­sager. C'est le cas, par exemple, des communes com­prenant quelques abonnés ; ceux-ci sont desservis par des lignes entièrement aériennes, allant directement, par le chemin le plus court, du bureau téléphonique chez l'abonné. Les conducteurs de cuivre ou de bronze sont placés sur des solateurs fixés eux-mêmes, le plus souvent, par des consoles, à des potelets scellés dans les murs des maisons.

Lorsque le nombre de lignes augmente, il y a intérêt, lorsqu'on construit la ligne, à ne pas se borner à tirer des lignes droites, pour réduire la longueur des fils, mais à les grouper ensemble de façon à former des nap­pes de fils plus importantes, supportées par les mêmes potelets ou poteaux.

Lorsque les réseaux atteignent cinquante abonnés et plus, on est conduit à réaliser des réseaux dits aéro-sou­terrains. Les lignes des abonnés partent du central, dans des câbles sous plomb ; ceux-ci vont ensuite se ramifier en des câbles de moindre importance, pour finir en câbles de sept et vingt-huit paires qui aboutis­sent à des points de concentration d'où partent des lignes aériennes. C'est sur ce principe que sont constitués la quasi-totalité des réseaux urbains en France ; il n'y a guère que Paris et Lyon qui ne comprennent que des lignes entièrement souterraines.

L'étude du téléphone automatique date de 1880. Déjà en 1900, des villes américaines étaient entièrement équi­pées en automatique. En Europe, les premiers de ces postes furent installés en Allemagne. Quel que soit le système employé, la manœuvre à exécuter par l'abonné, ainsi que son poste sont les mêmes. Le poste de l'abon­né est un poste à batterie centrale, simplement com­plété par un interrupteur normalement au repos, placé en série sur la ligne, et actionné par un cadran. Ce cadran est formé d'une partie fixe comportant un disque sur lequel sont figurés des numéros devant 1esquels peut se déplacer un disque percé de trous. On enfonce le doigt dans le trou correspondant au chiffre que l'on veut émettre et on fait tourner le cadran jusqu'à ce que le doigt rencontre une butée d'arrêt ; à ce moment on abandonne le disque mobile, celui-ci, en revenant au repos, entraîne une came isolante qui passe à travers des ressorts, au contact en position de repos. Ces res­sorts sont placés en série sur la ligne de l'abonné. Cha­que fois que la came passe entre eux, elle produit donc une rupture de circuit ; ces ruptures en nombre égal au chiffre composé, ont pour effet de matérialiser en quelque sorte le chiffre émis. Le rythme de ces ruptures de courant doit être déterminé avec précision : la ca­dence doit être de neuf à onze ruptures par secondes. Cette vitesse devant être indépendante de la personne qui manipule le cadran, celui-ci n'est actif que pendant le retour au repos sous l'action d'un ressort, l'abonné ayant abandonné le ressort. Supposons que nous soyons dans une installation de cent abonnés et que l’on de­mande le poste 24. Si nous provoquons, au moyen du cadran d'abord, deux interruption, puis quatre, on conçoit qu'un mécanisme au central puisse en déduire que c'est le numéro 24 qui est demandé.

Indiquons comment ce mécanisme fonctionne dans les systèmes pas à pas. Dans le système de beaucoup le plus répandu, le système pas à pas ou Stromger et ses dérivés Siémens et Halske, Automatic Electric. Co, etc., voici comment agissent ces impulsions : la ligne du demandeur aboutit à un appareil mécanique appelé connecteur, constitué par un arbre portant deux frot­teurs reliés aux fils de la ligne du demandeur, et sus­ceptible de se déplacer devant une série de 100 double contacts disposés en 10 rangées horizontales de 10 su­perposées. L'arbre peut prendre un mouvement d'as­cension, puis un mouvement de rotation. On conçoit que si l'on fait monter l'arbre de deux rangées, puis si on l'amène dans cette rangée au quatrième contact, le frotteur relie les contacts de la ligne appelante à ceux de la ligne appelée. Il faudra donc que les deux pre­mières impulsions émises agissent sur un organe fai­sant monter le connecteur, et les quatre autres sur un organe le faisant tourner. Ces organes sont des électro­-aimants dont l'armature porte un cliquet qui agit sur un pignon denté. On distingue deux électros, celui d'ascension et celui de rotation.

Avec le téléphone automatique, on arrive, en Suisse, à communiquer avec un correspondant se trouvant à cinquante kilomètres. Dans le programme des télépho­nes français, on compte transformer tous les postes manuels en automatiques. Dans l'exploitation du ser­vice public des téléphones, un appareil qui se compli­que de plus en plus avec l'automatique, c'est le comp­teur taxeur de communications. Car, dans le prix que l'on fait payer à l'abonné, intervient à la fois la durée des communications, leur nombre et la distance à laquelle on téléphone.

Dans la vie moderne, on peut dire que les réseaux téléphoniques jouent un rôle de premier plan. C'est principalement dans le monde des affaires, des trafi­quants et des agioteurs que ces appareils sont le plus utilisés.

Une particularité des communications téléphoniques, qu'on ne doit pas ignorer, c'est que le secret des communications n'existe pas. Il y a même, dépendant de la police parisienne, un système de tables d'écoute très perfectionnées où certains numéros particulièrement repérés sont l'objet d'une surveillance attentive. ­

Alexandre LAURANT.