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UNITÉ n. f.

Dans la société capitaliste et hiérarchique, ou appelle improprement « unités » des accords particuliers, sur des fins communes à des groupements quelconques. Mais, ces soi-disant unités, généralement sectaires et partiales - et même contradictoires entre elles - aboutissent tôt ou tard, sauf de rares exceptions, à des conflits, des scissions pénibles, et à des oppositions farouchement hostiles. On sait, d'ailleurs, que toute organisation comportant le privilège de fonction est injuste, anti-unitaire.

Très différente est l'unité anarchiste fondée sur l'amour pur de la vie libre, heureuse et sûre, et dont l'idéal est succinctement indiqué dans sa devise : « Instaurer un milieu social qui assure à chaque individu le maximum de bien-être et de liberté adéquat à chaque époque ».

Un tel idéal implique évidemment une morale qui le justifie. Morale de juste réciprocité que nous trouvons dans le vieil et double aphorisme suivant : Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît ; mais agis toujours envers les autres comme tu voudrais qu'on agît à ton égard en d'identiques circonstances. (En supposant, bien entendu, une connaissance suffisante du bien contemporain.)

Ce juste précepte rencontre pourtant de nombreuses transgressions, conséquences sociales ou inconsciences regrettables et illogiques contradictions. Quoi qu'il en soit, c'est cet aphorisme moral qui constitue le critérium unitaire fondamental, puisque toute dérogation à son principe est absolument incompatible avec l'unité sympathique. Mais l'expérience nous apprend à dépasser les limites d'égale réciprocité, et à ne rien demander au-dessus des facultés personnelles, si l'on veut contribuer à la vivante et salutaire unité. Il est, en effet, nécessaire que le fort, le mieux doué, œuvre généreusement pour le faible ; et il est clair que tous ceux et celles qui manifestent de telles dispositions, forment en tout temps et tout lieu, la meilleure élite.

Malgré certaines affirmations erronées - et quoi qu'elle évolue par les connaissances acquises - l'unité dépend toujours plus du vouloir que du savoir, car l'aveuglante vanité est commune, même chez les savants. Si la base unitaire est sentimentale, sa cause immédiate et effective résulte partout de besoins communs, entretenus ou modifiés par des tendances et connaissances partagées.

La trilogie de l'unité, profondément égalitaire et libertaire, est : l'amour orientateur, la science révélatrice et le travail producteur. Cette unité concerne tous les égoïsmes normaux et conséquents du monde civilisable. Sa hiérarchie naturelle et toute effective ne saurait engendrer aucune dépendance artificielle, aucune autorité. Elle est, dans tous les domaines, une libre manifestation de la vie individuelle et collective, exempte d'uniformité mesquine, dogmatique, vicieuse et funeste,

L'unité anarchiste vitale n'est point un accord relatif et temporaire, mais une harmonie permanente à tendances générales et progressives, toujours corrélative au temps et aux moyens. Elle est, enfin, la synthèse de l'amour éclairé, idéalement absolu, mais effectivement relatif et conditionnel. Son élément demeure constamment individuel et sympathique, sollicitant tous les bons sentiments et toutes les connaissances utiles au bonheur, à la sécurité, à la paix mondiale.

- A. MAUZÉ.