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ABDICATION n. f. 

UNITÉ (PROLÉTARIENNE)

Au moment où la reconstitution de l'unité syndicale entre dans sa phase finale, il est tout naturel de traiter cette question dans notre Encyclopédie.

C'est non seulement naturel, mais c'est indispensable, parce que l'histoire de l'unité est aussi celle de la scission et qu'elle n'est encore connue que de quelques initiés qui, par leurs fonctions, ont été appelés à vivre vraiment les événements qui se sont déroulés le plus souvent dans la coulisse et sont restés, par conséquent, totalement inconnus des masses travailleuses bernées.

Ma qualité de secrétaire général du Comité Central des Comités Syndicalistes Révolutionnaires, puis de secrétaire adjoint du même Comité, ma participation active aux travaux de la Commission Administrative de la C.G.T.U., ma désignation au poste de secrétaire général du Comité de Défense Syndicaliste et à celui de secrétaire de l'Union Fédérative des Syndicats Autonomes de France, m'ont permis de suivre pas à pas les évènements qui se sont déroulés de 1920 jusqu'en 1926, époque de la constitution de la Confédération Générale du Travail Syndicaliste Révolutionnaire.

Et, depuis le 15 novembre 1926, je suis avec attention, de très près, au sein de la C. A. de la C.G.T.S.R., les tractations et pourparlers auxquels l'unité syndicale a donné lieu.

Avant d'aller plus loin et de faire l'exposé historique de la question, deux constatations s'imposent, ce sont celles-ci :

1° - L'unité, comme la scission, sera l'œuvre des partis politiques ;

2° - Une unité de cet ordre restera précaire aussi longtemps que le mouvement syndical sera incapable de s'opposer à l'action dissolvante des partis ; aussi longtemps que la notion de parti primera, dans l'esprit des travailleurs, la lutte de classe ; jusqu'à ce que le réel prenne le pas sur l'artificiel.

Répéter que la scission est l'œuvre des partis politiques et de leurs représentants au sein du mouvement syndical, c'est exprimer une vérité devenue banale. Il faut, cependant, le dire, l'affirmer ici avec d'autant plus de force que les partis (socialiste et communiste) prétendent être les champions incontestés de l'unité. Il faut le proclamer parce qu'en réalisant cette unité, sur le terrain politique et économique, ces partis n'ont en vue que de servir leurs intérêts, à l'exclusion de ceux des travailleurs.

En faisant alternativement, selon les exigences de leur politique, la scission ou l'unité, en soufflant ainsi le froid et le chaud, les partis dits ouvriers ont fait la démonstration éclatante qu'ils n'avaient aucun souci des intérêts de la classe ouvrière. Aussi, si je me refuse à mettre à leur actif la reconstitution d'une unité dont ils escomptent le bénéfice exclusif, j'inscris carrément à leur passif la scission qui a réduit, pendant quinze ans, le prolétariat de tous les pays à l'impuissance, favorisé l'accession au pouvoir du fascisme dans la plus grande partie des pays de l'Europe. Et je demande aux travailleurs de ne jamais oublier ces pages sombres de leur Histoire.

Je leur demande également, s'ils réalisent, comme tout l'indique, l'unité syndicale, de ne plus la laisser briser, sous quelque prétexte que ce soit et, pour cela, d'affirmer la maîtrise totale de leur mouvement, dans une indépendance absolue et définitive.

Examinons, maintenant, quand, comment et pour quelles raisons la scission s'est produite.

A mon avis, sa préparation, qui dura près de quatre ans, remonte à 1917 ; elle commença peu après la conférence confédérale de Clermont-Ferrand, où les deux fractions de la C.G.T., déjà fortement divisées sur la politique suivie par la majorité pendant la guerre, se « réconcilièrent » sur un nègre-blanc, sans provoquer le choc dynamique qui aurait redressé la Centrale syndicale française.

La révolution russe entrait dans sa deuxième phase : celle d'octobre 1917, et Lénine, avec juste raison, recherchait des appuis à l'extérieur, en France tout particulièrement, pour empêcher la formation autour de ses frontières de ce que Clemenceau appelait le « cordon sanitaire », c'est-à-dire, pour parler clair, le blocus économique et l'intervention militaire conjuguée du dedans et du dehors, ces deux armes redoutables de la contre-révolution mondiale.

Pour échapper à cette étreinte, qui risquait d'être mortelle, les chefs de la révolution russe ne pouvaient que chercher à étendre la révolution aux pays voisins : d'abord à l'Europe, si possible, et au monde entier, si les circonstances le permettaient. Leur raisonnement était juste et les conditions d'une telle révolution à l'échelle européenne, universelle peut-être, étaient largement réunies. Il restait à faire passer la conception dans la pratique, en utilisant la situation particulièrement favorable.

C'est dans ce passage de la conception à la pratique que les dirigeants russes commirent des fautes si impardonnables, pour des hommes comme Lénine et Trotsky, qu'on en reste, encore aujourd'hui, absolument confondu.

La principale de ces fautes est la méconnaissance absolue des mouvements ouvriers des autres pays et, tout particulièrement, du mouvement français, si spécial par son origine, ses caractéristique et le tempérament de la race.

Au lieu de s'adresser en frères au syndicalisme français, dont l'immense majorité était absolument acquise à l'idée de la révolution sociale dans son propre pays, les dirigeants russes tentèrent de lui imposer brutalement, par des moyens obliques et des procédés condamnables, leur propre conception de la lutte, leur doctrine et leur discipline : toutes choses qui firent se cabrer quantité de militants tout disposés à la lutte, mais qui voulaient rester maîtres de leur action, de leur tactique, et se refusaient à agir comme des petits garçons qu'on morigène à tout instant.

Cette attitude des révolutionnaires russes eut une autre conséquence : elle fournit des armes aux dirigeants de la C.G.T. peu enclins à engager une bataille de cette envergure.

Ces faits ne se passèrent pas qu'en France. Tous les prolétariats de l'Europe et même du monde, dont le concours était pourtant absolument nécessaire, furent traités avec le même mépris, avec la même ignorance des faits, sur la foi de renseignements donnés à Moscou par des hommes qui n'avaient aucune qualité pour remplir un tel rôle.

L'échec de la révolution européenne, de la révolution mondiale peut-être, vient exclusivement de l'incompréhension totale, par les dirigeants russes, du mouvement des autres pays, de leur autoritarisme, de leur mépris des militants et des organisations régulières de ces pays.

Si, au lieu d'agir ainsi, les hommes qui dirigeaient la révolution russe avaient compris que les peuples agissent selon les caractéristiques de leur propre génie, ce qui exclut l'uniformité mais crée l'harmonie dans la diversité ; s'ils avaient fait loyalement et directement appel aux centrales syndicales et à leurs militants, en les laissant libres du choix de l'heure, des moyens et du but, il n'est pas douteux que la révolution sociale serait devenue, à très brève échéance, une réalité sur le plan où elle était possible et nécessaire pour assurer, avec le salut de la révolution russe, le succès de la révolution européenne et, sans doute, mondiale.

A une question aussi nettement et honnêtement posée, les centrales syndicales - celle de France la première - n'auraient pu que répondre affirmativement, d'autant plus rapidement que toutes les conditions de l'action révolutionnaire étaient, je le répète, réunies.

Les révolutionnaires russes, aveuglés par leur succès, jugeant de toute leur hauteur le reste des hommes - comme si leur révolution avait été la première et devait être la dernière à se produire dans le monde - trouvèrent plus expédient de noyauter, par tous les moyens, y compris les pires, les éléments actifs du mouvement syndical français ; de les dresser les uns contre les autres de façon absurde ; de pratiquer une politique de manœuvres et de contre-manœuvres absolument ridicule ; de provoquer une sorte de gymnastique gréviste constante qui démolit, une à une, toutes les organisations puissantes et, en particulier, les métallurgistes et les cheminots,

Cette politique qui consistait à utiliser comme tremplin les revendications légitimes des travailleurs et comme levain le désir d'action incontestable des masses laborieuses, provoqua les échecs successifs qui, de proche en proche, nous conduisirent à la débâcle de mai 1920, après la capitulation confédérale du 21juillet 1919.

Il ne pouvait en être autrement. En effet, sentant le péril qui les menaçait, les dirigeants de la C.G.T. freinèrent autant qu'ils purent l'action des travailleurs. Quand ils ne purent, malgré tout, l'arrêter, ils la brisèrent in-extremis ou la rendirent inopérante par des compromis, comme celui de février 1920, qui enlevaient toute valeur au succès remporté.

Les Congrès de Lyon (1919), Orléans (1920) et Lille (1921) indiquent de façon saisissante les points culminants des luttes de tendance qui aboutirent à la scission du mouvement syndical français.

Ayant plus que jamais besoin d'avoir dans chaque pays un mouvement docile à leur injonction et capable d'appuyer leur politique extérieure, Lénine, 'Trotsky, Zinoviev et leurs amis prirent la décision de détruire, par la scission, les centrales et les partis qui leur résistaient.

Ils avaient l'espoir que, l'enthousiasme des masses aidant, ils pourraient faire disparaitre, par la suite, facilement, les fractions d'organisations rebelles à leurs ordres. Et c'est là qu'ils commirent leur deuxième faute, plus impardonnable peut-être que la première.

En effet, la scission du parti socialiste, à Tours en 1920, celle de la C.G.T., en février 1922, permirent de grouper dans le Parti communiste et la C.G.T.U., en l'espace de quelques mois, l'immense majorité des forces actives de l'ancien Parti socialiste et de la vieille C.G.T.

Si, instruits - comme ils auraient dû l'être - par les expériences des années 1918 à 1920, les dirigeants de Moscou avaient compris le caractère français, s'ils avaient su ménager les susceptibilités des militants politiques et, surtout, syndicaux, il n'est pas douteux qu'en très peu de temps le Parti socialiste et la C.G.T. eussent été totalement vidés de leurs contenus, que ces organisations eussent été réduites à leur plus simple expression : un bureau et un cachet. Il est également certain qu'en très peu de temps, le mouvement ouvrier français aurait pansé ses plaies et retrouvé son allant et sa puissance révolutionnaire, par un effort bien dosé, pratique et fécond en résultats.

Au lieu de procéder ainsi, les dirigeants de l'Internationale Communiste, puis ceux de l'Internationale Syndicale Rouge - les mêmes au surplus - déclenchèrent la lutte intestine au sein des nouvelles organisations ; ils dressèrent les uns comme les autres des militants également mais différemment révolutionnaires, en excluant ceux-ci, en tentant de déshonorer ceux-là et, bientôt l'inévitable se produisit : le Parti communiste et la C.G.T.U. devinrent deux immenses « paniers de crabes », dont le contenu se dévorait pour le plus grand plaisir de la bourgeoisie capitaliste et le plus grand désarroi du prolétariat.

Les années 1922 à 1924 virent, enfin, le triomphe des hommes de Moscou sur les ruines du mouvement ouvrier français. Les principes du communisme léniniste étaient saufs, mais les organisations françaises étaient mortes en même temps que la révolution s'éloignait pour la deuxième fois, par la faute de gens dont la politique sinueuse n'a jamais cessé d'être une énigme indéchiffrable jusqu'à ce jour.

En même temps que se développe cette action dévastatrice, qui permet au Parti socialiste et à la C.G.T. de remonter peu à peu le courant, la politique intérieure et extérieure russe se modifie sensiblement.

La Conférence de Gênes (1922) ouvre les voies à la Nouvelle Économie Politique, la fameuse N.E.P., qui marque le commencement des tractations politiques et économiques des dirigeants russes avec les gouvernants capitalistes, les financiers, les grands capitaines d'industrie, si honnis à l'extérieur, pour la galerie, et si bien reçus à Moscou, pour les concours « précieux et désintéressés » qu'ils offrirent, concours qui furent agréés, le plus souvent, au détriment des travailleurs russes.

Cette coquetterie avec le Capitalisme, les réceptions offertes au prince Henri de Prusse, les relations très amicales entretenues avec Mussolini et le Pape, les conversations d'affaires avec les magnats allemands et américains vont conduire le gouvernement soviétique à adopter une politique absolument machiavélique.

Comment concilier, en effet, les thèses de l'Internationale Communiste qui préconisent toujours, pour les purs - aussi naïfs que purs - , le déclenchement de la révolution mondiale et la construction du socialisme dans un seul pays : la Russie ? Comment faire admettre que le gouvernement russe poursuit encore la destruction du système capitaliste, lorsqu'il négocie avec ses représentants les plus qualifiés ?

Comment faire disparaître ces forces extérieures dont Moscou n'a plus besoin, qui le gênent au contraire dans ses négociations ?

Comment préparer l'entrée de la Russie Soviétique dans le concert des nations, à Genève, à la S.D.N. et au B.I.T., sans avoir, auparavant, abjuré toute foi révolutionnaire ?

C'est à toutes ces tâches qu'ont travaillé, sans relâche, les dirigeants russes depuis dix ans. Comment ont-ils pratiqué pour atteindre leurs objectifs ?

- Sur le plan politique : En excluant à tour de bras, en provoquant sans cesse la constitution de nouveaux partis, en sapant du dedans, par l'action de leurs agents et des personnages louches à leur solde, tout le travail établi et exécuté par des hommes restés sincères ; en faisant régulièrement élire au parlement les pires adversaires des travailleurs ; en pratiquant la fameuse tactique « classe contre classe », qui réduisit les députés communistes à l'effectif d'une escouade, alors que, si Moscou l'avait voulu, ils eussent pu être 50 à 60. Enfin, en prenant tournant sur tournant, virage sur virage, au bout desquels les exécutants, ahuris, se retrouvaient régulièrement « projetés dans le décor » ; en pratiquant la fameuse tactique « de la volaille à plumer », si chère au capitaine Treint, dont la Pologne blanche refusa les services contre les Soviets, en 1920-1921, les dirigeants de l'Internationale Communiste achevèrent de désorienter les militants et les adhérents de leur section française, dont le nombre descendit rapidement de 100.000 à 25.000 membres.

- Sur le plan syndical : Sur ce terrain, la résistance fut particulièrement vigoureuse. Il fallut deux années et demie d'efforts au Parti communiste français pour se rendre maître réellement de la C.G.T.U. et encore n'y parvint-il qu'en utilisant les grands moyens : attentats répétés contre les militants anarcho-syndicalistes, complots fomentés avec le concours de la 'Tchéka internationale à l'étranger, et en particulier celui de 1923, à l'occasion de l'occupation de la Rhur, qui donna naissance au fameux faux de Hambourg, préparé par Radek à Berlin et qu'avala, comme un serin, Poincaré ; assassinat prémédité des militants syndicalistes à la salle de l'Union des Syndicats, rue de la Grange-aux-Belles, à Paris, où Poncet et Clos trouvèrent la mort, assassinat que devaient dénoncer des « dizainiers » communistes écœurés : le tout, bien entendu, en offrant le « front unique » à la C.G.T. et en proposant l'unité syndicale.

Enfin, la scission dans la C.G.T.U., réduite en peu de temps, de 390.000 membres à 150.000 adhérents, groupés dans des fédérations endettées et ne vivant que par le soutien de Moscou, avec l'unique but de détruire ce qui restait encore du mouvement dit « unitaire ».

Et là, les Staliniens se surpassèrent. Ne pouvant renvoyer chez eux les « fidèles » qui persistaient, contre toute évidence, à rester convaincus de la valeur des doctrines moscovites, ils les décimèrent à coups de grèves « malheureuses », perdues d'avance, cependant qu'ils ne manquaient pas, avec la mystique de l'unité syndicale, de faire pénétrer l'idée, chez les récalcitrants à la débâcle, du caractère tout provisoire de la C.G.T.U., déjà habilement scissionnée en 1924-1925.

A travers les méandres d'une telle politique qui permit à la C.G.T. de reprendre du poil de la bête à un point tel qu'elle est aujourd'hui l'arbitre de la situation, une idée, toujours poursuivie, apparaît nettement : la disparition d'un mouvement syndical, fabriqué de toutes pièces, dont on n' a plus besoin à Moscou et qu'on liquide par l'unité dans un réformisme parfaitement conforme à la tactique du gouvernement bolchevique qui ne peut reculer son adhésion à la Société des Nations, qui pratique la politique traditionnelle de la Russie à l'extérieur et conclut alliances et pactes avec les gouvernements capitalistes, avec une persistance et un « succès » que rien ne dément ni n'arrête.

Aujourd'hui, la révolution soviétique est définitivement close. Les politiciens russes se retrouvent sur le plan de la collaboration des classes avec tous les autres marxistes assagis et rien ne s'oppose à ce que, politiquement et syndicalement, tous ces fils d'un même père spirituel se retrouvent dans une seule et même famille, pour conquérir, électoralement, le pouvoir.

L'unité ? Elle n'a pour but que d'assurer, en France, en 1936, avant si possible, le triomphe des politiciens socialistes et communistes, flanqués de tous leurs succédanés et réconciliés sur le dos d'une classe ouvrière trompée et bafouée pendant quinze ans, qu'on tentera d'asservir définitivement en l'enchaînant au char de la bourgeoisie, à Genève et ici.

A la C.G.T.S.R., nous sommes pour l'Unité ; mais, une unité maquignonnée comme celle qui est en cours n'a, à nos yeux, aucun intérêt réel pour la classe ouvrière.

Les syndicats qui adhéraient au Comité de Défense Syndicaliste, au lendemain du Congrès de Saint-Etienne en 1922, ont défini notre position ; la Fédération des Syndicats Autonomes de France l'a confirmée, aux Congrès des deux C.G.T., en 1925. La. C.G.T.S.R. n'a cessé, depuis sa fondation, d'exposer et de définir la même attitude et, dans sa délibération, au lendemain de la grève générale du 12 février 1934, la C.A. l'a, une fois de plus, affirmée dans les termes suivants :

« Résolution sur l'Unité. - Appelée à examiner les conditions dans lesquelles s'est déroulée la grève générale du 12 février 1934, la Commission Administrative de la Confédération Générale du Travail Syndicaliste Révolutionnaire constate :

« 1° Que l'ordre de grève a été scrupuleusement suivi par toutes les organisations syndicales appartenant à notre Centrale ;

« 2° Que l'unité d'action à la base s'est réalisée spontanément dans l'ensemble du pays, sans discussion ni accord préalables ;

« 3° Que cette unité d'action a permis à la classe ouvrière française d'attendre son objectif, qui était de barrer la route au fascisme.

« Enregistrant ces résultats, la C.A. est convaincue que toute nouvelle offensive fasciste dressera, dans les mêmes conditions, le prolétariat français coutre son ennemi. Elle est également certaine que toute offensive ouvrière contre le fascisme réunirait, pour la lutte, la totalité des forces ouvrières de ce pays.

« De même, la C.A. est unanime à affirmer que l'unité d'action, scellée dans l'offensive, c'est-à-dire pendant la phase finale de la destruction du système capitaliste, se transformera, automatiquement, en unité organique révolutionnaire, pour la construction de l'ordre nouveau.

« Aussi, fidèle à sa doctrine et à sa tactique, qui viennent de recevoir la confirmation éclatante des faits, la C.G.T.S.R. demande à tous ses syndicats de poursuivre leurs efforts sur le même plan, avec les mêmes méthodes, à réaliser, partout et spontanément, l'unité d'action avec tous les travailleurs, chaque fois que les circonstances l'exigeront.

« Elle leur demande, en outre, de se préparer à l'action décisive, au cours de laquelle se scellera définitivement et organiquement l'unité syndicale de tous les travailleurs.

« Elle considère que, pour porter tous ses fruits, l'unité organique doit marquer le triomphe et l'indépendance totale du syndicalisme et réaliser la substitution de la notion de classe à la notion de parti.

« Une telle unité doit avoir pour conséquence et comme but l'établissement, par les travailleurs, sur les plans économique, administratif et social, d'un régime d'égalité sociale complète et comporter, pour les individus et les groupements, la liberté, définitivement consacrée.

« En conséquence, la C. A. déclare qu'il ne peut s'agir de réaliser à un moment quelconque, sous n'importe quel prétexte, en dehors des conditions ci-dessus indiquées, une unité qui ne profiterait qu'aux partis politiques, ayant fait au préalable leur propre unité, pour conquérir le pouvoir et l'exercer au détriment de la classe ouvrière. -

LA C.A. DE LA C.G.T.S.R. »

Cette résolution est d'une netteté absolue. Elle est, aussi , complète. Elle ne comporte aucune équivoque, n'amorce aucune manœuvre. Elle n'est, à l'encontre de toutes les autres, inspirée que par le souci de l'intérêt supérieur du prolétariat. Elle dégage de la leçon du passé les enseignements qui s'imposent et ne peuvent être que salutaires.

Elle indique clairement quel doit être le but à atteindre : la Révolution. Elle précise quel doit être l'objectif de cette dernière.

L'unité que propose la C.G.T.S.R. est donc une unité sérieuse et honnête, solide et durable.

Elle n'a rien de commun avec l'unité politico-économique qui est en gestation en ce moment et ne vise : qu'à conserver le contact avec la bourgeoisie dite libérale, à faire triompher le réformisme social, et permettre au gouvernement russe de faire son entrée officielle à Genève, à rendre possible la conclusion d'une nouvelle alliance franco-russe qui risque, à un moment donné, comme l'ancienne, de devenir un des plus sérieux éléments de conflit européen et peut-être mondial.

De quelque façon que l'unité se réalise, je souhaite en tout cas qu'elle soit définitive ; qu'elle marque le triomphe du syndicalisme sur tous les partis, que les syndicats l'utilisent uniquement pour atteindre leur but, en faisant triompher le programme que la C.G.T.S.R. a établi, ce programme qui alarme tant tous les partis et les deux autres C.G.T., ce programme révolutionnaire qui tient tout entier en ces deux phrases :

- Toute l'Économie aux Syndicats !

- Toute l'Administration sociale aux comités !

Pierre BESNARD.