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Encyclopédie anarchiste
« La pensée libertaire constitue l’espoir et la chance des derniers hommes libres » Camus
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Un savoir au service de l’émancipation
Article mis en ligne le 10 juillet 2021
dernière modification le 12 juillet 2021

Une science ne doit pas être posée comme une norme. Le savant étudie des faits, accomplit des analyses, propose des conclusions, avance, le cas échéant et avec prudence, des « solutions ». La géographie elle-même est-elle une science ou un savoir ? Ceux qui ont voulu en faire une science normative ont conduit à de graves dérives.

Friedrich Ratzel

Ce fut le cas de la Geopolitik germanique fondée à partir de la politische geographie formée par Friedrich Ratzel, élève de Ernst Haeckel, biologiste, penseur social-darwinien, racialiste, belliciste, pangermaniste et anti-socialiste, et fondateur de l’écologie (1866). Il est donc dangereux de parler de « géographie anarchiste », tandis qu’il existe des « géographes anarchistes » mobilisant les méthodes et les outils de la géographie pour l’émancipation, mobilisant aussi les principes et l’histoire de l’anarchisme pour éclairer la géographie.

Les anarchistes géographes peuvent fournir une lecture des situations territoriales qui précise les enjeux (ZAD, Rojava, places publiques, frontières…). La commune, le local, le petit, ne suffisent toutefois pas sous peine d’égoïsmes locaux ou d’entropie : il faut aussi l’échange, le lien, le fédéral sous la forme de contrats synallagmatiques (obligation réciproque entre les parties) et commutatifs (équivalence des charges, des droits et des devoirs). Ces contrats reposent sur le mandat impératif et révocable.

La géographie par sa déclinaison des échelles révèle l’emboîtement des différents facteurs sans tomber dans des généralisations du type « mondialisation » ou « vaisseau spatial terrestre » qui confortent l’idée d’une gouvernance mondiale et promeuvent sa réalisation. Mobilisant la géomorphologie, la biogéographie et la climatologie, elle analyse au plus près la réalité physique et socio-spatiale des milieux sans tomber dans la négation des problèmes ou bien, inversement, dans l’outrance catastrophiste qui profite aux « prophètes de malheur » comme les appelle Élisée Reclus en conclusion de L’Homme et la Terre.

La grande majorité des mouvements sociaux actuels de par le monde ont une pratique géographique : occupation des places publiques avec les Indignés, lors des soulèvements en Tunisie, en Égypte ou en Turquie, réappropriation des lieux communs comme en Grèce, zones à défendre contre des projets inutiles comme à Notre-Dame-des-Landes ou dans la vallée de Suse, organisation de circuits économiques courts ou différents avec les Amaps ou les SEL (Système d’échanges locaux). Que ce soit à Oaxaca au Mexique ou à Port-Saïd, le communalisme reste vivant…

De la convergence d’une pensée géographique libre avec ces actions inscrites dans l’espace peut s’épanouir un nouvel espoir d’émancipation.