ASSOCIATION INTERNATIONALE DES TRAVAILLEURS
Nom d’une union internationale de tous les ouvriers ayant pour but l’appui mutuel dans la lutte pour l’amélioration des conditions de la vie et pour la conquête de la société socialiste.
Hist. En 1864, à l’occasion d’une exposition internationale à Londres, des ouvriers français et anglais se réunirent dans la salle Saint-Martin, afin de réaliser l’idée d’une union étroite des ouvriers de tous les pays. Un Comité fut formé, qui eut la mission de rédiger un programme et les statuts pour l’Union internationale. Comme membre de ce Comité, fut élu, entr’autres, Karl Marx, qui prenait part aux travaux de l’Union. Le premier Congrès international régulier eut lieu du 3 au 8 septembre 1866, à Genève (Suisse). Une organisation internationale y fut définitivement constituée. Elle adopta le nom de : « Association Internationale des Travailleurs » (A.I.T.). A la tête de l’A.I.T. se trouvait le Conseil Général qui devait assurer le lien entre les sections séparées de l’organisation. Comme but de l’A.I.T., le programme spécifiait l’émancipation économique de la classe ouvrière. Les statuts laissèrent à chaque section la pleine indépendance, ainsi que la liberté d’entrer directement en relations avec le Conseil général. Le deuxième Congrès eut lieu à Lausanne, du 2 au 7 septembre 1867. C’est au troisième Congrès, à Bruxelles, du 6 au 13 septembre 1868, que la grève générale fut désignée comme l’unique moyen d’empêcher la guerre et d’assurer la paix. Le quatrième Congrès eut lieu à Bâle, du 5 au 12 septembre 1869. C’est à ce Congrès que commencèrent les grandes discussions entre Marx et Bakounine. Le premier préconisait le centralisme, le parlementarisme et l’action politique comme moyen de lutte. Le second prêchait l’antiétatisme et le fédéralisme. C’est à ce Congrès qu’on vit, pour la première fois, le grand succès de l’idée fédéraliste et l’importance des unions ouvrières. C’est là que fut affirmée l’idée de l’annulation de l’État et de son remplacement par des unions de producteurs.
Les débuts, pleins de succès, de Bakounine à l’Internationale, ainsi que son influence croissante, amenèrent le renforcement de l’aile antiautoritaire, fédéraliste.
C’était dangereux pour Marx et ses partisans. Alors, un jeu d’intrigues contre les fédéralistes commença et aboutit à la dissolution de la section alliée de Genève. Le siège du Conseil général se trouvait à Londres et était sous l’influence de Karl Marx. En 1870, il n’y eut pas de Congrès, à cause de la guerre. En 1871, le Conseil général convoqua, à Londres, uneconférence fermée où furent invités et parurent surtout les délégués partisans de Marx et du Conseil général. Les Belges, les Espagnols et les Italiens penchaient, avec Bakounine, au fédéralisme. Les Jurassiens n’étaient pas présents à la Conférence. L’invitation fut faite de telle sorte que les partisans du Conseil général se trouvèrent en majorité. La conférence fut utilisée par Marx à rendre obligatoire, pour les membres de l’Internationale, l’action parlementaire rejetée par l’aile latine. Cela est arrivé par la mise aux voix et l’adoption de la résolution suivante :
« Vu que le prolétariat comme classe, ne pourrait se dresser contre la violence collective des classes possédantes autrement qu’en se constituant en un parti politique particulier, en lutte contre tous les vieux partis des classes possédantes ; que cette constitution du prolétariat en un parti politique est indispensables pour assurer 1e triomphe de la révolution sociale et de son but final : l’abolition des classes ; que l’union des forces des travailleurs, qui fut déjà atteinte à l’aide des luttes économiques, devra servir aussi comme levier pour les masses de cette classe dans leur lutte contre le pouvoir politique de leurs exploiteurs, - la Conférence rappelle aux membres de l’Internationale, qu’étant donné l’état de guerre où se trouve la classe ouvrière, son action économique et politique sont liées d’une façon inséparable. »
Conformément à cela, la puissance du Conseil général augmenta : il s’appropria un pouvoir autoritaire vis-à-vis des sections, dans le but de veiller sur la doctrine. L’aile latine, qui se dressait contre le centralisme et le parlementarisme, devait être muselée. De cette façon, un coin fut enfoncé dans « l’Internationale », qui, finalement, amena une scission directement provoquée par Karl Marx, au cinquième Congrès de La Haye, du 2 au 7 septembre 1872. Les partisans de Marx y disposaient de 40 voix, les fédéralistes, de 25 seulement. Cette proportion inégale de voix fut le résultat d’une machination de Marx. Il prit toutes dispositions pour que les délégués de l’Allemagne, où se trouvaient ses partisans, vinssent en nombre au Congrès. Ainsi, une majorité marxiste fut créée. Le Congrès de La Haye approuva les décisions de la Conférence de Londres ; la puissance du Conseil général augmenta encore ; l’article sur la nécessité de l’action politique fut introduit dans les statuts de « l’Internationale ». Le point de vue des fédéralistes, les jurassiens en tête, fut exposé parJames Guillaume. Il précisa la différence entre les marxistes et les fédéralistes, en déclarant que les premiers cherchaient à conquérir le pouvoir politique, au moyen de la participation aux élections parlementaires, tandis que les seconds cherchaient à le détruire. Marx profita également de ce Congrès pour lancer des calomnies contre Bakounine, qui n’était pas présent. Une commission fut formée dont la majorité se composait des partisans de Marx, et qui prononça l’exclusion de « l’Internationale » de Bakounine, de Guillaume, de Schwitzguébel et d’autres encore. L’exclusion des deux premiers fut décidée, malgré la déclaration du président de la Commission, le délégué allemand Cuno, qu’il n’y avait pas de preuves matérielles contre les accusés. La minorité déposa, en la personne de Victor Dave, une déclaration disant qu’elle avait l’intention de défendre dans « l’Internationale », l’autonomie fédérale. Ainsi, les prétentions injustes et autoritaires des marxistes amenèrent la scission dans « l’Internationale ».
Les fédéralistes organisèrent alors, à leur
tour, un Congrès à Saint-Imier, le 15 septembre 1872, auquel
participèrent tous les éléments antiautoritaires et fédéralistes de
l’Internationale. Toute l’aile latine de cette dernière y était
représentée, notamment les sections : jurassienne, italienne,
espagnole, française et, de plus, deux sections américaines. C’est à ce
Congrès que furent formulés les principes fondamentaux du mouvement
ouvrier libertaire, qui peuvent servir au prolétariat révolutionnaire,
aujourd’hui encore, comme indicateurs de route. Les résolutions sur
l’action politique ainsi que sur les unions professionnelles et leurs
tâches s’expriment de la manière suivante :
« Considérant :
« Que vouloir imposer au prolétariat une ligne de conduite ou un
programme politique uniforme, comme la voie unique qui puisse le
conduire à son émancipation sociale, est une prétention aussi absurde
que réactionnaire ;
« Que nul n’a le droit de priver les fédérations et sections autonomes
du droit incontestable de déterminer elles-mêmes et de suivre la ligne
de conduite politique qu’elle croiront la meilleure et que toute
tentative semblable nous conduirait fatalement au plus révoltant
dogmatisme ;
« Que les aspirations du Prolétariat ne peuvent avoir d’autre objet que
l’établissement d’une organisation et d’une fédération économiques
absolument libres, fondées sur le travail et l’égalité de tous et
absolument indépendantes de tout gouvernement politique et que cette
organisation et cette fédération ne peuvent être que le résultat de
l’action spontanée du Prolétariat lui-même, des corps de métier et des
communes autonomes.
« Considérant :
« Que toute organisation politique ne peut rien être que l’organisation
de la domination au profit d’une classe et au détriment des masses, et
que le Prolétariat s’il voulait s’emparer du Pouvoir, deviendrait
lui-même une classe dominante et exploitante ;
« Le Congrès, réuni à St-Imier, déclare :
« 1° Que la destruction de tout pouvoir politique est le premier devoir
du Prolétariat ;
« 2° Que toute organisation d’un pouvoir politique soi-disant
provisoire et révolutionnaire pour amener cette destruction ne peut
être qu’une tromperie de plus et serait aussi dangereuse pour le
Prolétariat que tous les Gouvernements existant aujourd’hui ;
« 3° Que, repoussant tout compromis pour arriver à l’accomplissement de
la Révolution sociale, les prolétaires de tous les pays doivent
établir, en dehors de toute politique bourgeoise, la solidarité de
l’action révolutionnaire. »
Autre résolution :
« La liberté et le travail sont la base de la morale, de la force, de
la vie et de la richesse de l’avenir. Mais le travail, s’il n’est pas
librement organisé, devient oppressif et improductif pour le
travailleur ; et c’est pour cela que l’organisation du travail est la
condition indispensable de la véritable et complète émancipation de
l’ouvrier.
« Cependant, le travail ne peut s’exercer librement sans la possession
des matières premières et de tout le capital social ; il ne peut
s’organiser si l’ouvrier, s’émancipant de la tyrannie politique et
économique, ne conquiert le droit de se développer complètement dans
toutes ses facultés. Tout État, c’est-à-dire tout Gouvernement et toute
administration des masses populaires, de haut en bas, étant
nécessairement fondé sur la bureaucratie, sur les armées, sur
l’espionnage, sur le clergé, ne pourra jamais établir la société
organisée sur le travail et sur la justice, puisque, par la nature même
de son organisme, il est poussé fatalement à opprimer celui-là et à
nier celle-ci.
« Suivant nous, l’ouvrier ne pourra jamais s’émanciper de l’oppression
séculaire, si à ce corps absorbant et démoralisateur, il ne substitue
la libre fédération de tous les groupes producteurs fondée sur la
solidarité et l’égalité. »
Après les deux Congrès de 1872, celui de La Haye et celui de Saint-Imier, les Congrès ultérieurs des deux tendances ne se tenaient que séparément. Le Conseil général de la majorité marxiste fut transféré à New-York. Ce fut son enterrement. Au contraire, toutes les sections de « l’Internationale », à l’exception de la section allemande, se rangèrent au point de vue des Jurassiens. Les trade-unions anglaises même étaient contre le Conseil général dirigé par Marx. Lorsque, un an plus tard, les deux tendances, la marxiste et la fédéraliste, convoquèrent leurs Congrès à Genève, ces Congrès siégèrent séparément.
Le deuxième Congrès des aritiautoritaires siégea du 1er au 6 septembre 1873, celui des marxistes du 8 au 13 septembre. Il était devenu clair, maintenant, que les marxistes se trouvaient en pleine déroute. Ce fut leur dernier Congrès. Le Congrès des fédéralistes fut très fréquenté. Il élabora de nouveaux statuts pour « l’Internationale ». Le Conseil général fut supprimé. La question de la grève générale fut discutée. Elle ne fut pas, toutefois, définitivement réglée, vu le nombre encore très restreint d’organisations ouvrières a cette époque. Le Congrès des marxistes fut un fiasco complet. A part. les délégués allemands et autrichiens, il n’y en eut presque pas d’autres, de sorte qu’on se vit obligé de renoncer à la convocation de Congrès ultérieurs. Quant à l’aile antiautoritaire, fédéraliste, elle resta debout. Mais elle aussi a beaucoup souffert, d’une part, à cause de la scission provoquée par Marx, d’autre part, par suite de la réaction générale instaurée dans toute l’Europe après la chute de la Commune. Trois Congrès eurent encore lieu : le 3e, à Bruxelles, du 7 au 13 septembre 1874 ; le 4è, à Berne, du 26 au 29 octobre 1876 ; et le 5e, à Verviers, du 6 au 8 septembre 1877. En 1877. eut lieu également un Congrès général socialiste à Genève, d’où prit son essor l’Internationale social-démocrate. On finit par s’entendre de façon qu’un bureau commun pour les deux Internationales fut créé. Ce fut la fin des Congrès et de « l’Internationale ». qui reçut plus tard le nom de « Première Internationale ». (Voir Internationale.)
A partir de ce moment, commença une autre période qui aboutit à la formation et l’organisation de « l’Internationale » connue, aujourd’hui encore, sous le nom de « 2e Internationale ». Cette dernière sera traitée au mot : Internationale. Le seul fait qui nous intéresse ici est celui qu’en 1892, au Congrès de Londres, les anarchistes et les antiparlementaires furent exclus de l’internationale. Jusque-là, les deux tendances coexistaient. l’une auprès de l’autre, au sein de la même organisation.
L’époque qui suivit fut une décadence du
mouvement ouvrier international. L’hégémonie de l’Allemagne sur tout le
continent européen, après la guerre de 1870-71. amena aussi une
prépondérance du mouvement ouvrier allemand sur celui des autres pays ,
surtout des pays latins. Avec cela, les méthodes allemandes du
parlementarisme prirent le dessus, tandis nue les traditions de l’aile
fédéraliste de la 1re Internationale déclinèrent.
L’Association Internationale des Travailleurs (A.I.T. d’aujourd’hui)
Quelques dizaines d’années passèrent avant que les éléments libertaires, dans le mouvement ouvrier, fussent redevenus assez forts pour se réunir sur une échelle internationale. C’est avec le développement du Syndicalisme révolutionnaire antiétatiste que le temps vint revivifier le mouvement ouvrier international dans le sens de la tendance antiautoritaire de la 1re Internationale. L’aile antiautoritaire de la 1re Internationale ayant déjà considéré les organisations professionnelles révolutionnaires (au point de vue économie) comme, les organes appelés à guider la lutte du prolétariat conscient de son devoir de classe, et à mener vers le succès la révolution sociale, le syndicalisme révolutionnaire reprit et continua cette tendance. Aussi l’A. I. T. d’aujourd’hui peut compter pour la seule héritière véritable des meilleures traditions de l’aile antiautoritaire de la 1re Internationale.
En 1913 déjà, se réunirent, à Londres, les
délégués des organisations syndicalistes-révolutionnaires de presque
tous les pays européens et autres, afin de poser la. première pierre
d’une nouvelle Internationale ouvrière devant suivre le chemin tracé
par la 1re Internationale. La résolution principale adoptée à Londres
portait :
« Le premier congrès international syndicaliste reconnaît que la classe
ouvrière de tous les pays souffre de la même répression par l’État et
le système capitaliste. Par là il se déclare pour la lutte de classe et
1a solidarité internationale, pour l’organisation indépendante de la
classe ouvrière sur la base d’union fédérative.
« II tend à l’élévation immédiate matérielle et morale de la classe
ouvrière jusqu’à la destruction finale du capitalisme et de l’État.
« Il déclare, ensuite, que la lutte de classes est une conséquence
nécessaire de la possession privée des moyens de production et de
distribution, et par là il tend à la socialisation de cette possession.
« A ceci appartiennent l’élaboration et le développement des
organisations syndicalistes, dans ce sens qu’elles sont en état de
faire avancer la fabrication et la distribution de produits dans
l’intérêt de la société entière.
« Constatant que les syndicats internationaux ne peuvent faire la lutte
de classe avec succès que lorsque les ouvriers cesseront de se diviser
sur des différence-politiques et religieuses, le congrès déclare que la
lutte. comme telle, ne pourra être que d’un caractère économique,
exprimant par cela que les organisations ne tâchent pas d’atteindre
leur but par des collaborations de gouvernement et leurs assistants, et
qu’elles s’appuient seulement, par excellence, sur le pouvoir des
organisations et leur action directe.
« En conséquence de cette déclaration, le congrès fait appel aux
travailleurs de tous les pays pour s’unir en organisations
industrielles fédératives indépendante sur la base de la solidarité
internationale avec le but de délivrance complète de la répression par
l’État et le capitalisme. »
Malheureusement, l’œuvre de la réunion internationale des organisations industrielles révolutionnaire libertaires fut interrompue par la guerre éclatée en 1914. Tous les pays se fermèrent hermétiquement Toute liaison internationale des travailleurs devint impossible. La réaction dura jusqu’à la fin de la guerre La révolution en Russie et en Europe centrale créa une situation nouvelle. Les forces dispersées du prolétariat révolutionnaire recommencèrent à s’unir. La tentative de continuer l’œuvre commencée à Londres en 1913 ne réussit, cependant, qu’en 1920. Cette année là, une conférence syndicaliste préliminaire eut lieu à Berlin, du 16 au 21 décembre. Les organisations suivantes y étaient représentées : les I. W. W. de l’Amérique, la F. O. R. A. de l’Argentine, le Comité syndicaliste-révolutionnaire (France), la F.A. U. D. (Allemagne), le Schop-Steward and Workers Committee Movement (Angleterre), l’organisation centrale des ouvriers suédois (Suède) et le National Arbeids Secretariat de la Hollande. En outre, l’Union syndicaliste italienne, la Confederacion Nacional del Trabajo (Espagne), la Fédération Syndicaliste de la Norvège et l’opposition des unions professionnelles danoises, se déclarèrent d’accord pour la création d’une « Internationale Syndicaliste », tout en exprimant leur regret de ne pas avoir pu prendre part à la Conférence. Les unions professionnelles russes étaient représentées par Bélenky qui était là à titre de visiteur.
On adopta à cette conférence la résolution
suivante :
« 1° L’Internationale Révolutionnaire du Travail se place, sans aucune
réserve, sur le point de vue de la lutte de classe révolutionnaire et
du pouvoir de la classe ouvrière.
« 2° L’Internationale Révolutionnaire du Travail tend à la destruction
et à l’anéantissement du régime économique, politique et moral du
système capitaliste et de l’État. Elle tend à la fondation d’une
société communiste libre.
« 3° La conférence constate que la classe ouvrière est seule en état de
détruire l’esclavage économique, politique et moral du capitalisme par
l’application la plus sévère de ses moyens de pouvoir économique qui
trouvent leur expression dans l’action directe révolutionnaire de la
classe ouvrière pour atteindre ce but.
« 4° L’Internationale Révolutionnaire du Travail se place ensuite sur
le point de vue que la construction et que l’organisation de la
production et de la distribution sont la tâche de l’organisation
économique dans chaque pays.
« 5° L’Internationale Révolutionnaire du Travail est entièrement
indépendante de tout parti politique. Dans le cas où l’Internationale
Révolutionnaire du Travail déciderait une action et que les partis
politiques ou toute autre organisation se déclareraient d’accord avec
cette action ou vice-versa, alors l’exécution de cette action peut se
faire en commun avec ses partis et organisations.
« 6° La conférence adresse un appel urgent à toutes les organisations
syndicalistes révolutionnaires et industrielles et les invite à prendre
part au Congrès convoqué le 1er mai 1921 à Moscou par le Conseil
provisoire de l’Internationale Rouge du Travail (I. S. R.) afin de
fonder une Internationale Révolutionnaire du Travail unifiée de tous
les travailleurs du monde. »
Lorsque, en été 1921, eut lieu, à Moscou, le Congrès constitutif de l’Internationale Syndicale Rouge (I. S. R.), les syndicalistes révolutionnaires y étaient représentés, il est vrai, en grand nombre. Il y avait, cependant, aussi des organisations syndicalistes révolutionnaires qui, à ce moment déjà, se rangèrent au point de vue de ne pas vouloir vivre aux frais du gouvernement de la Russie. Ce point de vue était, en première ligne, celui des syndicalistes allemands qui avaient fait, préalablement, au sujet d’une délégation à Moscou, un référendum dans leurs rangs, qui donna un résultat négatif. On supposait, d’autre part, que les communistes russes n’iraient jamais jusqu’à tolérer une Internationale syndicaliste révolutionnaire véritablement indépendante, c’est-à-dire, antiautoritaire, car ils défendaient la théorie d’après laquelle une dictature du Parti devait être exercée sur les unions professionnelles.
Cette supposition fut justifiée. Ayant formé une majorité à leur dévotion, les Russes ont su étouffer l’opinion des syndicalistes révolutionnaires. Mais, à Moscou déjà, la minorité se serra et tomba d’accord sur un manifeste contre le Congrès. Au Congrès des anarcho syndicalistes, à Dusseldorf, en automne 1921, eut lieu, complémentairement, une petite conférence internationale à laquelle prirent part : un délégué des I.W.W., un autre des syndicalistes suédois, une délégation des syndicalistes hollandais et les syndicalistes allemands. A cette conférence, la décision fut prise de convoquer à Berlin, l’année suivante, une conférence internationale des organisations qui n’étaient pas d’accord avec les décisions du Congrès de Moscou.
Cette Conférence préliminaire des syndicalistes eut lieu à Berlin, du 16 au 18 juin 1922. Y étaient représentés : la Freie Arbeiter Union Deutschlands (Allemagne), la Unione Sindacale Italiana (Italie), la Confédération Générale du Travail Unitaire (France), la Confederacion Nacional del Trabajo (Espagne), la Sveriges Arbetares Centralorganisation (Suède), la Norsk Syndikalistisk Federation (Norvège), la minorité syndicaliste des unions professionnelles russes, la Federaciôn Obrera Regional (Argentine). Il y avait aussi un représentant des unions professionnelles russes, qui fut admis à titre auditif.
La dernière grande discussion avec les
unions professionnelles russes eut lieu à cette conférence. Au moment
où devait être élaborée une résolution de protestation contre les
persécutions des ouvriers révolutionnaires, les représentants de la
minorité syndicaliste de Russie essayèrent aussi la mise en liberté des
révolutionnaires emprisonnés en Russie soviétique. Le représentant des
unions professionnelles russes, Andréieff, défendit les mesures
politiques du gouvernement russe. Une âpre discussion éclata.
Finalement, une Commission fut nommée, qui posa nettement au
représentant des unions professionnelles russes les deux questions
suivantes :
« 1° Le Comité Central des unions professionnelles russes pense-t-il
intervenir, de façon formelle, en vue de la mise en liberté de tous les
syndicalistes et anarchistes emprisonnés pour leurs idées ?
« 2° Le même Comité a-t-il l’intention d’exiger que les camarades
puissent développer librement leur activité révolutionnaire dans les
unions professionnelles, à la condition qu’ils ne luttent pas contre le
gouvernement russe les armes à la main ? »
La réponse à ces questions fut donnée par trois fois, mais toujours équivoque. Il devint absolument clair que le gouvernement russe était défendu par les unions professionnelles russes. La Conférence se prononça alors pour les révolutionnaires emprisonnés en Russie soviétique. Lorsque le représentant des unions professionnelles russes comprit qu’il ne pourrait rien obtenir, il quitta la Conférence. Dès ce moment, la séparation des deux organisations : des unions professionnelles autoritaires de la Russie soviétiste et des organisations syndicalistes révolutionnaires antiautoritaires fut un fait accompli.
La Conférence élabora, en dix thèses, une déclaration de principes du syndicalisme révolutionnaire, qui fut adoptée unanimement. Cette déclaration fut adoptée presqu’en entier, par le Congrès constitutif ultérieur de l’Association Internationale des Travailleurs, et nous la citons plus bas. Ensuite, la Conférence adopta une résolution contrel’Internationale Rouge ; car, affirma-t-elle, elle n’y voyait pas la véritable base sur laquelle pourrait s’unir le prolétariat révolutionnaire du monde entier. Un bureau provisoire fut formé, qui devait convoquer un congrès international des syndicalistes révolutionnaires. A ce congrès furent également invitées les organisations qui adhéraient à l’Internationale Rouge. Le siège du Bureau fut fixé à Berlin.
Enfin, du 25 décembre 1922 au 2 janvier 1923, eut lieu, à Berlin, le Congrès constitutif des syndicalistes révolutionnaires. A ce Congrès étaient représentées les organisations syndicales révolutionnaires de l’Argentine, du Chili, du Danemark, de l’Allemagne, de la France (Comité de défense syndicaliste), de la Hollande, de l’Italie, du Mexique, de la Norvège, du Portugal, de la Russie (la minorité), de la Suède, de l’Espagne, de la Tchécoslovaquie (la minorité). La déclaration de principes y fut adoptée, les statuts élaborés, et le nom de l’Union fédérale établi : l’Association Internationale des Travailleurs.
Ainsi ressuscita l’A. I. T., ceci non
seulement de nom, mais aussi comme essence. La déclaration de principes
et les statuts de l’A. I. T. portent :
1. Introduction
« La lutte séculaire entre exploités et exploiteurs a pris une
amplitude menaçante. Le Capital tout puissant, chancelant pour un
moment après la guerre mondiale et dévastatrice, surtout après la
grande révolution russe et les révolutions - bien que moins imposantes
- de la Hongrie et de l’Allemagne, relève sa tête hideuse. Malgré les
luttes intestines qui déchirent la bourgeoisie et le capitalisme
cosmopolite, ces derniers sont en bonne route pour s’entendre afin de
se jeter avec plus d’union et plus de force sur la classe ouvrière et
l’attacher au chariot triomphant du Capital.
« Le Capitalisme s’organise, et de la défensive dans laquelle il s’est
trouvé il repasse à l’offensive sur tous les fronts contre la classe
ouvrière épuisée par les guerres sanglantes et les révolutions
manquées. Cette offensive a son origine profonde dans deux causes bien
déterminées : d’abord la confusion des idées et des principes, qui
existe dans les rangs du mouvement ouvrier, le manque de clarté et de
cohésion sur les buts actuels et futurs de la classe ouvrière ; la
division en camps innombrables, souvent ennemis, - en un mot la
faiblesse et la désorganisation du mouvement ouvrier. Ensuite et
surtout la déroute subséquente de la Révolution Russe qui, au moment de
son éclosion, en raison même des grands principes énoncés par elle en
Novembre 1917, avait soulevé les plus grands espoirs chez tous les
prolétaires du monde, et qui est retombée au rang d’une révolution
politique ayant servi à maintenir la conquête du pouvoir étatiste aux
mains du parti communiste, dont le seul but est de monopoliser dans ses
mains toute la vie économique, politique et sociale du pays. Cette
déviation d’une révolution sociale en une révolution politique a eu
pour résultat une hypertrophie du socialisme étatiste dont la
conséquence a été le développement d’un système capitaliste aussi
exploiteur et aussi dominateur que tout autre système d’origine
bourgeoise. La nécessité de rétablir le capitalisme en Russie a été
l’enjeu du capitalisme mondial. Le socialisme étatiste, dénommé «
communisme », a sauvé le capitalisme bourgeois en faisant appel à son
aide pour... sauver la révolution !
« C’est ainsi que, grâce à ces deux éléments désorganisateurs - la
confusion dans les rangs du prolétariat et le bolchévisme capitaliste -
le gros capital industriel et foncier sent ses forces s’accroître et
ses chances de renaissance augmenter.
« Contre cette attaque serrée et internationale des exploiteurs de tout
aloi, il ne reste qu’un seul moyen : c’est l’organisation immédiate de
l’armée prolétarienne dans un organisme de lutte embrassant tous les
ouvriers révolutionnaires de tous les pays en un seul bloc granitique,
contre lequel viendraient se briser toutes les entreprises capitalistes
et qui finirait par les écraser sous son poids immense.
« Plusieurs tentatives ont déjà été faites dans ce sens. Deux de ces
tentatives espèrent encore y réussir : ce sont les deux Internationales
dites d’Amsterdam et de Moscou ; mais les deux portent en elles le
germe empoisonnant et autodestructeur. L’Internationale d’Amsterdam,
perdue dans le réformisme, considère que la seule solution du problème
social réside dans la collaboration des classes, dans la cohabitation
du Travail et du Capital et dans la révolution pacifique patiemment
attendue et réalisée, sans violence ni lutte, avec le consentement et
l’approbation de la bourgeoisie. L’Internationale de Moscou, de son
côté, considère que le Parti Communiste est l’arbitre suprême de toute
révolution, et que ce n’est que sous la férule de ce parti que les
révolutions à venir devront être déclenchées et consommées. Il est à
regretter que dans les rangs du prolétariat révolutionnaire conscient
et organisé il existe encore des tendances supportant ce qui, en
théorie comme en pratique, ne pouvait plus tenir debout :
l’organisation de l’État, c’est-à-dire l’organisation de l’esclavage,
du salariat, de la police, de l’armée, du joug politique, - en un mot
de la soi-disant dictature du prolétariat qui ne peut être autre chose
qu’un frein à la force expropriatrice directe et qu’une suppression de
la souveraineté réelle de la classe ouvrière et qui devient, par là, la
dictature de fer d’une clique politique sur le prolétariat. C’est
l’hégémonie du communisme autoritaire, c’est-à-dire la pire forme de
l’autoritarisme, du césarisme en politique, de la complète destruction
de l’individu.
« Contre l’offensive du Capital d’un côté, contre les politiciens de
toute envergure de l’autre, les ouvriers révolutionnaires du monde
doivent donc dresser une vraie association internationale des
travailleurs dont chaque membre saura que l’émancipation finale des
travailleurs ne sera possible que lorsque les travailleurs eux-mêmes,
en tant que travailleurs, dans leurs organisations économiques, seront
préparés non seulement à prendre possession de la terre et des usines,
mais aussi à les gérer en commun et faire de telle sorte qu’ils soient
en état de continuer la production.
« Avec cette perspective devant lui, le Congrès International des
Syndicalistes Révolutionnaires, réuni à Berlin en décembre 1922,
déclare sienne la déclaration de principes suivante, élaborés par la
Conférence Préalable des Syndicalistes Révolutionnaires (Juin, 1922) :
2. Principes du Syndicalisme Révolutionnaire
« 1. Le syndicalisme révolutionnaire, se basant sur la lutte de classe,
tend à l’union de tous les travailleurs manuels et intellectuels dans
des organisations économiques de combat luttant pour leur
affranchissement du joug du salariat et de l’oppression de l’État. Son
but consiste en la réorganisation de la vie sociale sur la base du
communisme libre, au moyen de l’action révolutionnaire de la classe
ouvrière elle-même. Il considère que seules les organisations
économiques du prolétariat sont capables de réaliser ce but, et
s’adresse, par conséquent, aux ouvriers, en leur qualité de producteurs
et de créateurs des richesses sociales, en opposition aux partis
politiques ouvriers modernes qui ne peuvent jamais être considérés du
point de vue de la réorganisation économique.
« 2. Le syndicalisme révolutionnaire est ennemi convaincu de tout
monopole économique et social, et tend vers leur abolition au moyen de
communes économiques et d’organes administratifs des ouvriers des
champs et des usines sur la base d’un système libre de Conseils
affranchis de toute subordination à tout pouvoir ou parti politique. Il
érige contre la politique de l’État et des partis l’organisation
économique du travail ; contre le gouvernement des hommes, la gestion
des choses. Il n’a pas, par conséquent, pour but la conquête des
pouvoirs politiques, mais l’abolition de toute fonction étatiste dans
la vie sociale. Il considère qu’avec le monopole de la propriété doit
aussi disparaître le monopole de la domination, et que toute forme
d’État, la forme de la « Dictature du Prolétariat » y comprise, ne peut
jamais être un instrument d’affranchissement, mais sera toujours
créateur de nouveaux monopoles et de nouveaux privilèges.
« 3. La double tâche du syndicalisme révolutionnaire est la suivante :
d’un côté il poursuit la lutte révolutionnaire quotidienne pour
l’amélioration économique, sociale et intellectuelle de la classe
ouvrière dans les cadres de la société actuelle. De l’autre côté, son
but final est d’élever les masses à la gestion indépendante de la
production et de la distribution, ainsi qu’à la prise de possession de
toutes les ramifications de la vie sociale. Il est convaincu que
l’organisation d’un système économique reposant, de la base au faite,
sur le producteur ne peut jamais être réglée par des décrets
gouvernementaux, mais seulement par l’action commune de tous les
travailleurs manuels et intellectuels dans chaque branche d’industrie,
par la gestion des fabriques par les producteurs eux-mêmes sous une
forme telle que chaque groupement, usine ou branche d’industrie soit un
membre autonome de l’organisme économique général et développe
systématiquement sur un plan déterminé et sur la base d’accords
mutuels, la production et la distribution dans l’intérêt de toute la
communauté.
« 4. Le syndicalisme révolutionnaire est opposé à toute tendance et
organisation centralistes qui ne sont qu’empruntées à l’État et à
l’Eglise et qui étouffent méthodiquement tout esprit d’initiative et
toute pensée indépendante. Le centralisme est l’organisation
artificielle de haut en bas qui remet en bloc, aux mains d’une poignée,
la réglementation des affaires de toute la communauté. L’individu ne
devient alors qu’un automate dirigé et mis en mouvement d’en haut. Les
intérêts de la communauté font place aux privilèges de quelques-uns ;
la diversité est remplacée par l’uniformité ; la responsabilité
personnelle fait place à la discipline inanimée ; le dressage remplace
l’éducation. C’est pour cette raison que le syndicalisme
révolutionnaire se place sur le point de vue de l’organisation
fédéraliste, c’est-à-dire de l’organisation de bas en haut, de l’union
libre de toutes les forces sur la base des idées et intérêts communs.
« 5. Le syndicalisme révolutionnaire rejette toute activité
parlementaire et toute collaboration avec les organismes législatifs.
Le suffrage le plus libre ne peut faire disparaître les contradictions
flagrantes existant au sein de la société actuelle ; le système
parlementaire n’a qu’un seul but, celui de prêter un simulacre de droit
légal au règne du mensonge et de l’injustice sociale ; amener les
esclaves à apposer le sceau de la Loi à leur propre esclavage.
« 6. Le syndicalisme révolutionnaire rejette toutes les frontières
politiques et nationales arbitrairement fixées et ne voit dans le
nationalisme que la religion de l’État moderne, derrière laquelle se
cachent les intérêts matériels des classes possédantes. Il ne reconnaît
que des différences d’ordre régional et exige pour tout groupement le
droit de sa propre détermination en accord solidaire avec toutes les
autres associations d’ordre économique, régional ou national.
« 7. C’est pour les mêmes raisons que le syndicalisme révolutionnaire
combat le militarisme sous toutes ses formes et considère la propagande
anti-militariste comme une de ses tâches les plus importantes dans la
lutte contre le système actuel. En première ligne, il faut considérer
le refus individuel et, surtout, le boycottage organisé contre la
fabrication du matériel de guerre.
« 8. Le syndicalisme révolutionnaire se place sur le terrain de
l’action directe et soutient toutes les luttes qui ne sont pas en
contradiction avec ses buts : l’abolition du monopole économique et de
la domination de l’État. Les moyens de lutte sont : la grève, le
boycottage, le sabotage, etc. - L’action directe trouve son expression
la plus profonde dans la grève générale qui, en même temps, doit être,
du point de vue du syndicalisme révolutionnaire, le prélude de la
révolution sociale.
« 9. Ennemis de toute violence organisée entre les mains d’un
gouvernement quelconque, les syndicalistes n’oublient pas que les
luttes décisives entre le capitalisme d’aujourd’hui et le communisme
libre de demain ne se passeront pas sans collisions sérieuses. Ils
reconnaissent, par conséquent, la violence comme moyen de défense
contre les méthodes de violence des classes régnantes dans la lutte
pour l’expropriation des moyens de production et de la terre par le
peuple révolutionnaire. Tout comme cette expropriation ne peut être
commencée et menée à bonne fin que par les organisations économiques
révolutionnaires des travailleurs, la défense de la révolution doit
aussi se trouver dans les mains de ces organismes économiques et non
dans celles d’une organisation militaire ou autre œuvrant en dehors de
ces organes économiques.
« 10. Ce n’est pas dans les organisations économiques révolutionnaires
de la classe ouvrière que se trouve la force capable de réaliser son
affranchissement et l’énergie créatrice nécessaire pour la
réorganisation de la société sur la base du communisme libre. » Dès
lors, l’A. I. T. se développa toujours progressivement. Elle réunit
aujourd’hui en son sein toutes les organisations professionnelles et
syndicales révolutionnaires antiautoritaires.
L’A. I. T. eut son 2e Congrès en Hollande, au printemps 1925. L’organisation y fut fortifiée. Elle prit nettement position vis-à-vis des autres tendances dans le mouvement ouvrier. La résolution suivante y fut adoptée :
Résolution du Congrès d’Amsterdam
Le deuxième congrès de l’A. I. T. réitère sa
conviction fixée dans les statuts de l’A. I. T., à savoir :
« Que, bien que toutes les organisations économiques du prolétariat
soient capables de lutter pour les revendications économiques au sein
de la société actuelle et de les réaliser, seules les organisations
ouvrières révolutionnaires anti-autoritaires représentent la seule
forme naturelle, véridique, susceptible d’entreprendre la
réorganisation de la vie économique et sociale sur les bases du
communisme libertaire ;
« Que les partis politiques, quel que soit le nom dont ils s’affublent,
ne peuvent jamais être considérés comme force motrice de la
réorganisation économique, car leur activité se déploie exclusivement
sur « le terrain de la conquête du pouvoir étatiste ;
« Qu’un des buts primordiaux du mouvement ouvrier doit être non pas la
conquête du pouvoir, mais la suppression de tout organisme dominateur
et centraliste dans la vie sociale, étant donné que l’indépendance du
mouvement ouvrier est la condition principale sur la route pour la
réalisation de son but final ;
« Plaçant ces principes à la base de son activité, le Congrès a
considéré que la moindre tentative de subordination des syndicats à des
partis politiques quelconques détourne inévitablement la classe
ouvrière de ses propres buts et aspirations et que, par conséquent,
-toute coalition entre les organismes économiques de la classe ouvrière
et les partis politiques est dangereuse et néfaste.
« Le Congrès rejette néanmoins la définition trompeuse qui place au
même niveau les partis aspirant au pouvoir politique et les groupements
idéologiques qui agissent dans la direction de la transformation
sociale, en dehors de tout principe d’autorité et d’étatisme.
« Devant cette situation, pleine de dangers pour la classe ouvrière
mondiale, le IIe Congrès de l’A. I. T. considère qu’il est du devoir
des syndicalistes révolutionnaires de continuer, plus énergiquement que
jamais, l’œuvre de regroupement de la famille syndicaliste sur les
bases des principes du syndicalisme révolutionnaire tels qu’ils sont
énoncés par les statuts de l’A. I. T. ; de ne participer à aucune
conférence d’unité syndicale entreprise par ceux qui désirent étouffer
le mouvement ouvrier en le faisant la proie des partis politiques quels
qu’ils soient ; de grouper autour de l’A. I. T. toutes les forces
révolutionnaires anti-étatistes du monde entier. »
Le Congrès a également protesté contre la réaction dans tous les pays, réclamé le droit d’expression par la pensée et par la presse, et fait appel à la classe ouvrière mondiale pour lutter contre le fascisme et la dictature.
Le Congrès adopta en outre des résolutions fixant l’attitude de l’A. I. T. en face des luttes quotidiennes pratiques, de l’application du plan Dawes à l’Allemagne, du rôle mondial des jeunesses syndicalistes, ainsi que des résolutions fixant l’action internationale de l’A. I. T. et les relations de celle-ci avec les Fédérations internationales d’industrie.
Le Congrès prit fin en organisant une Commission internationale d’Etudes...
Les hommes qui dirigent les affaires de l’A. I. T., sont : Rudolf Rocker, A. Schapiro, Augustin Souchy, Bernhard Lansink, A. Borghi, A. Jensen, D.-A. Santillan.
A. SOUCHY.